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Canal Détox

Être réinfecté par le SARS-CoV-2, vraiment ?

    La question de la réinfection par le SARS-CoV-2 s’est posée très tôt au cours de la pandémie. Dès l’automne 2020, plusieurs études de cas évaluées par les pairs et publiées dans des journaux scientifiques confirmaient qu’il était possible d’être réinfecté. Toutefois, les données disponibles sur le sujet sont longtemps demeurées parcellaires et même, […]

Le 02 Déc 2021 | Par INSERM (Salle de presse)

Microscopie électronique d’une cellule infectée par le SARS-CoV-2 (© Philippe Roingeard et Sébastien Eymieux, unité Inserm U1259, Morphogenèse et antigénicité du VIH et des virus des hépatites, Université de Tours, France)

 

Article actualisé le 2 décembre 2021 à l’aide des données scientifiques dont nous disposons à ce jour.

Cet article a été publié le 27 octobre 2020. Il est susceptible d’évoluer au fur et à mesure que de nouvelles données émergent.

 

La question de la réinfection par le SARS-CoV-2 s’est posée très tôt au cours de la pandémie. Dès l’automne 2020, plusieurs études de cas évaluées par les pairs et publiées dans des journaux scientifiques confirmaient qu’il était possible d’être réinfecté.

Toutefois, les données disponibles sur le sujet sont longtemps demeurées parcellaires et même, aujourd’hui, en l’état actuel des connaissances, la plupart des scientifiques s’accordent pour dire que le phénomène de réinfection demeure relativement rare.

Il apparaît néanmoins nécessaire de continuer les recherches sur cette thématique, et de manière plus générale sur l’immunité, afin de mieux la comprendre et d’appréhender les éventuelles caractéristiques immunologiques et génétiques communes qui pourraient exister entre les patients réinfectés. Pour y voir plus clair, Canal Détox fait le point sur ce que l’on sait et sur ce que l’on cherche encore à savoir au sujet des réinfections et de la réponse immunitaire après l’infection.

Premières pistes

Dès le printemps 2020, une étude publiée dans Nature Review Immunology menée sur des modèles animaux a montré qu’en réinfectant des primates non humains quelques temps après une première exposition au SARS-CoV-2, ceux-ci ne développaient aucun symptôme de la maladie. Par ailleurs, aucun signe de réplication du virus n’était observé dans des prélèvements nasopharyngés. Les conclusions de cette étude étaient donc prudemment optimistes, suggérant un certain degré d’immunisation contre le virus après une première infection.

À la même époque, des études décrivant les premiers cas de réinfection potentielle chez l’humain sont parues. Cependant, elles présentaient un certain nombre de limites. Par exemple, une étude publiée dans l’American Journal of Emergency Medicine documentait le cas d’un patient de 82 ans admis à l’hôpital en avril. Après 28 jours en soins intensifs, celui-ci avait pu réintégrer son domicile à l’issue de deux tests PCR négatifs. Dix jours plus tard, l’émergence de nouveaux symptômes l’obligeait à se diriger vers les services hospitaliers.

La réinfection n’avait cependant pas pu être confirmée, les chercheurs estimant que des traces du virus auraient pu subsister dans son organisme entre ses deux passages à l’hôpital et que les tests PCR auraient pu donner des résultats faux négatifs. D’autres publications ont fait état de situations similaires, sans parvenir non plus à montrer qu’il s’agissait de réinfection.

 

Réinfections confirmées

Une étude publiée dans Clinical Infectious Diseases a d’abord montré qu’un patient avait été infecté à deux reprises à 142 jours d’intervalles. Il était asymptomatique la deuxième fois. Ces résultats ont été rendus possibles grâce à l’analyse du génome viral contenu dans des prélèvements effectués lors de la première et de la seconde infection, et à leur comparaison avec les séquences de SARS-CoV-2 sur la plateforme GISAID[1]. Les chercheurs ont montré qu’il s’agissait de deux souches différentes et que la patient avait donc été infecté deux fois, par deux formes génétiques distinctes de SARS-CoV-2. 

Des résultats similaires ont été publiés concernant d’autres études de cas où des patients étaient réinfectés par d’autres variants, mais aussi dans des études plus larges dans différents pays, confirmant que les réinfections sont possibles mais peu fréquentes, et qu’elles donnent rarement lieu à des formes sévères. Dans plusieurs cas, il a aussi été montré que le risque d’être réinfecté si l’on a déjà eu la Covid est moins élevé lorsque l’on est également vacciné.

Récemment, une large étude publiée dans NEJM et menée au Qatar s’est intéressée à 1304 cas de réinfections identifiés au sein d’une large base de données nationale. Parmi ces cas, ils ont notamment montré que 31 % étaient causés par le variant bêta, 4,4 % par le variant alpha. Par ailleurs, les chercheurs montrent encore que les réinfections aboutissent rarement à des symptômes sévères de la maladie. Dans cette étude, seuls 4 cas sur 1304 ont nécessité une hospitalisation, mais il n’y a eu aucun patient en réanimation et aucun décès.

 

Quelle immunité après l’infection ?

Si les personnes réinfectées souffrent peut-être d’un défaut de réponse immunitaire qu’il faut encore mettre en évidence, les données disponibles suggèrent donc qu’une forme d’immunité, même partielle, se met en place suite à un premier contact avec le virus. De nombreuses études ont ainsi été publiées permettant de mieux comprendre la réponse immunitaire montée par l’organisme après avoir été infecté par le SARS-CoV-2.

Plusieurs travaux soulignent ainsi que six à douze mois après l’infection, la plupart des anciens malades de la Covid-19 sont encore partiellement immunisés contre le virus.

Ainsi dans une étude publiée dans le journal Science, menée auprès de 200 patients convalescents, les scientifiques ont montré que 95 % d’entre eux présentaient encore une réponse immunitaire durable contre le virus dans les huit mois suivant l’infection. Les niveaux d’anticorps demeuraient stables, déclinant seulement légèrement six à huit mois après l’infection. La quantité de lymphocytes B spécifiques du virus augmentait quant à elle progressivement pour atteindre un pic six mois après infection, puis elle se stabilisait.

Enfin, les niveaux de lymphocytes T spécifiques du virus demeuraient aussi élevés. Six mois après l’infection, 92 % des individus présentaient des lymphocytes T CD4+ impliqués dans la coordination de la réponse immunitaire, tandis que la moitié d’entre eux présentaient des lymphocytes T CD8+, qui tuent les cellules infectées par le virus. La quantité de ces cellules variait beaucoup d’un individu à l’autre sans qu’aucun facteur explicatif (sexe ou âge des personnes par exemple) ne se détache particulièrement.

Ces données sont corroborées par des publications plus récentes dans le journal Nature, qui montrent que six à douze mois après infection, des patients convalescents présentent des niveaux d’anticorps stables mais également des lymphocytes B qui restent en mémoire au niveau de la moelle osseuse et peuvent réactiver la réponse immunitaire en cas de nouvelle infection.

Texte rédigé avec le soutien de Fréderic Altare, Directeur de Recherche Inserm

Directeur de l’Unité de Recherche Inserm « Immunologie et Nouveaux Concepts en Immunothérapie » (INCIT)

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