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L’Europe unit ses forces pour lutter contre les maladies parasitaires négligées

Le consortium international A-PARADDISE (Anti-Parasitic Drug Discovery in Epigenetics), coordonné par l’Inserm, vient d’obtenir un financement de 6 millions d’euros de la Commission européenne pour tester à grande échelle des traitements innovants contre quatre maladies parasitaires négligées : la bilharziose, la leishmaniose, la maladie de Chagas et le paludisme. Les chercheurs ont pour objectif commun de développer des nouveaux traitements contre les parasites responsables de ces maladies. Le projet rassemble 10 partenaires européens, ainsi que 5 brésiliens (présents dans la région où les maladies sont endémiques) et 2 australiens. L’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (Unité mixte Inserm / CNRS / Université de Strasbourg) accueillera l’ensemble des partenaires le 17 et 18 mars pour le lancement du projet. 

La bilharziose, la leishmaniose, la maladie de Chagas et le paludisme sont considérés comme des maladies négligées car l’effort et l’investissement consentis pour développer de nouvelles méthodes de traitement et de contrôle ont été sans commune mesure avec l’impact désastreux qu’elles ont sur les populations concernées. Elles touchent les populations des pays en voie de développement, principalement en Afrique, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud et dans l’Est de l’Asie, dans les zones tropicales et subtropicales. Environ un milliard de personnes y sont régulièrement exposées et près d’un million de personnes meurent des conséquences de ces maladies chaque année.

Actuellement, il n’existe pas encore de vaccin disponible pour se protéger de ces parasites. De plus, les traitements existants sont limités, soit par leurs effets secondaires, soit par le développement actuel ou potentiel de la résistance. Par conséquent, le consortium A-PARADDISE, coordonné par l’Inserm et piloté par Raymond Pierce, directeur de recherche au sein du Centre d’Infection et d’Immunité de Lille, se concentre sur la recherche de nouveaux médicaments contre ces parasitoses.

Le projet A-PARADDISE s’appuie sur la méthodologie approuvée dans un précédent projet d’envergure similaire (SEtTReND) pour développer des médicaments contre la bilharziose. Les chercheurs se sont intéressés à des enzymes de modification des histones (HME) – histones, qui sont responsables de la structure des chromosomes du parasite. En effet, il a été démontré que des inhibiteurs de différentes HME induisent une mort cellulaire, ce qui les rend donc toxiques pour ce parasite. Ce travail a fourni la preuve de concept de l’action de ces enzymes (HME) sur le parasite et a permis la constitution d’une banque de composés candidats qui peuvent maintenant rapidement être testés contre d’autres parasites humains.

Grâce au nouveau projet A-PARADDISE, les chercheurs vont pouvoir exploiter le principe de base et l’étendre en créant une plate-forme unique de tests de médicaments antiparasitaires ciblant les HME, afin de les intégrer dans un développement clinique.

 La méthode expérimentale consiste à tester physiquement et virtuellement l’efficacité et la toxicité des composants in vitro et in vivo.

L’objectif final du projet A-PARADDISE est de fournir un certain nombre de traitements candidats pour lutter contre ces quatre parasites et de rendre possible de prochains essais cliniques.

Pour accomplir ce travail, les participants au projet ont été sélectionnés pour leur expertise de haut niveau, chacun dans leur domaine : le criblage à haut débit, le criblage informatique, la production de protéines recombinantes, le séquençage à haut débit, les tests phénotypiques, la toxicologie et la pharmacologie.

A-PARADDISE: Anti-Parasitic Drug Discovery in Epigenetics

Le projet A-PARADDISE a débuté le 1er février 2014 et est soutenu par l’Union européenne (FP7, convention de subvention no. 602080) pendant 3 ans. Il est coordonné par l’Inserm et implique 17 partenaires, basés dans 5 pays européens, au Brésil et en Australie :

Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm), France
Centre Européen de Recherche en Biologie et Médecine (CERBM*), France
Martin Luther Universität Halle- Wittenberg (MLU), Allemagne
Universidade Federal do Rio de Janeiro (UFRJ), Brésil
Universidade de Sao Paulo (USP), Brésil
Albert Ludwigs Universität Freiburg  (ALU-FR), Allemagne
Fundação Oswaldo Cruz, Centro de Pesquisas René Rachou (Fiocruz), Brésil
Fundação Oswaldo Cruz, Instituto Carlos Chagas (Fiocruz), Brésil
Inserm Transfert SA (IT), France
KANCERA AB (KAN), Suède
Adlego Biomedical AB (Adlego), Suède
Griffith University (GU), Australie
University of Queensland (UQ), Australie
Università degli Studi di Roma La Sapienza  (UNIROMA1), Italie
University of East Anglia (UEA), Grande Bretagne
Fundação Arthur Bernardes – Universidade Federal de Viçosa (UFV), Brésil
Institut Pasteur Paris (IPP), France

* Le CERBM est l’entité européenne de l’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (IGBMC, Inserm/CNRS/Université de Strasbourg)

Une chercheuse française présente à la conférence annuelle du AAAS à Chicago

Des recherches européennes de pointe seront présentées à la conférence annuelle de l’American Association for the Advancement of Science (AAAS) à Chicago. L’Inserm sera représenté par Karine Clément, coordinatrice scientifique du projet européen METACARDIS (Metagenomics in Cardiometabolic Diseases), lors de la session intitulée : « De l’intérieur vers l’extérieur : l’impact de la flore intestinale sur le diabète et l’obésité ».

Trois éminents chercheurs européens sur le microbiome intestinal seront présents à la conférence de 2014 de l’AAAS, le samedi 15 février, pour partager leurs découvertes récentes sur les relations existant entre la flore intestinale et l’obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires en général. Leurs découvertes s’inscrivent dans un des domaines les plus innovants et passionnants de la recherche biomédicale, et pourraient apporter une contribution vitale à la recherche contre l’obésité et le diabète.

Au cours des dernières années, les recherches ont prouvé l’importance des quelque 1,5 kg de bactéries vivant à l’intérieur de notre corps, principalement dans l’intestin. Au-delà de leur rôle évident dans la digestion, ces bactéries participent aussi, par exemple, au développement du système immunitaire, du système neuronal, et sont impliquées dans l’apparition de certaines pathologies, comme le diabète ou les maladies cardiovasculaires.

Les intervenants : 

Karine Clément – Professeur, Institut de Cardiométabolisme et Nutrition (ICAN),  Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), France
La génomique fonctionnelle de l’obésité humaine reliée aux maladies cardiométaboliques
Coordinatrice du projet européen METACARDIS.

Sven Pettersson – Professeur, Institut Karolinska, Suède
Comment la flore intestinale du début de la vie peut contribuer à l’obésité et au diabète plus tard

Oluf B. Pedersen – Professeur, Université de Copenhague, Danemark
Liens entre le microbiote intestinal et les maladies métaboliques chez l’homme

Animatrice : Jenny Leonard – Rédacteur, Futurity.org, États-Unis
http://www.futurity.org/

 

À propos de la session :
http://aaas.confex.com/aaas/2014/webprogram/Session6938.html

Quand ? : Samedi 15 février 2014 – 13h à 14h30
Où ? : Grand Ballroom C North (Hyatt Regency, Chicago, Etats-Unis)

À propos de la conférence annuelle de l’AAAS à Chicago –  du 13 au 15 février 2014
La conférence annuelle de l’AAAS est un événement scientifique pour le grand public, largement reconnu. Des milliers d’éminents scientifiques, ingénieurs, éducateurs, responsables politiques et journalistes en provenance du monde entier s’y réunissent pour échanger sur les dernières avancées en science et technologie. Le thème de 2014, Répondre aux défis planétaires : découverte et innovation, est axé sur des solutions durables grâce à des solutions participatives, internationales et interdisciplinaires dans les domaines les plus utiles à la société et favorables à la croissance économique.

À propos de CommHERE
CommHERE – www.commhere.eu – a pour but d’accroître la visibilité des activités et des résultats des divers projets de recherche sur la santé, financés par l’Union européenne. Le consortium CommHERE englobe neuf établissements de recherche dans six pays européens et favorise des liens étroits entre les chercheurs œuvrant dans le domaine biomédical. Restez en contact avec la recherche européenne : www.horizonhealth.eu

Mécanisme élucidé : comment la perception des odeurs agit sur la prise alimentaire

L’équipe de chercheurs menée par Giovanni Marsicano, directeur de recherche Inserm au sein de l’unité 862 (NeuroCentre Magendie de Bordeaux), est parvenue à élucider comment le système endocannabinoïde contrôle la prise alimentaire en agissant sur la perception des odeurs. Ces travaux sont à paraître dans la revue Nature Neuroscience, datée du 9 février 2014.

Nature-Neuro Nose_illustration

© Charlie Padgett

Chez l’animal, comme chez l’homme, on sait que ce sont les mécanismes de la faim qui incitent la prise alimentaire. La faim déclenche un ensemble de mécanismes poussant à s’alimenter, comme par exemple l’augmentation des perceptions sensorielles telles que l’olfaction. Or, les chercheurs sont parvenus à démontrer ce qui lie dans le cerveau la faim à l’augmentation de la perception de l’odeur et par conséquent au besoin de manger.

Les chercheurs ont découvert chez la souris comment ce mécanisme est enclenché au niveau du système endocannabinoïde. Ce système rassemble des récepteurs situés dans le cerveau et impliqués dans différentes sensations comme l’euphorie ou l’anxiété, ou encore la douleur, et également sensibles aux substances cannabinoïdes, comme le cannabis.

Les chercheurs ont découvert que les récepteurs au cannabinoïdes CB1 contrôlent un circuit qui met en relation le bulbe olfactif (première région du système nerveux à traiter l’information olfactive, situé au-dessus du nez) et le cortex olfactif (structures supérieures du cerveau). Quand la sensation de faim est ressentie, elle déclenche l’activité des récepteurs cannabinoïdes qui activent à leur tour le circuit olfactif qui devient plus réactif.

C’est donc ce mécanisme biologique qui provoque l’augmentation de l’olfaction pendant la faim et qui explique une des raisons de la prise alimentaire et de l’attirance pour la nourriture.

Chez les patients obèses ou anorexiques, les chercheurs supposent que le circuit impliquant le système olfactif est altéré : la sensibilité aux odeurs va être plus ou moins forte par rapport à la normale. L’élucidation du mécanisme biologique permettra à long terme une meilleure prise en charge de ce type de pathologies.

Ces travaux ont été financés par l’ERC (European Research Council).

ERC : la France, premier pays européen en sciences de la vie

Le Conseil européen de la recherche (ERC) vient d’attribuer les bourses « Consolidator Grants » à 19 projets français en sciences de la vie, plaçant ainsi la France à la tête des pays européens porteurs de projets dans ce domaine. 

L’appel spécifique « Consolidator Grant » faisant partie du dernier appel ERC du 7e Programme-Cadre de Recherche et de Développement européen, récompense les meilleurs chercheurs qui ont entre 7 à 12 ans d’expérience après leur thèse. Les lauréats se voient ainsi attribuer une bourse d’en moyenne 1,84 million d’euros, et pouvant aller jusqu’à 2,75 millions d’euros, sur une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans.

Ce nouveau financement permettra à des chercheurs prometteurs de consolider leurs propres équipes de recherche et de développer leurs idées les plus innovantes. « Au vu de ces résultats, les membres d’Aviesan confirment leur excellence à l’international dans le domaine des sciences de la vie. Cette annonce conforte nos espoirs quant au succès de nos chercheurs lors du prochain Programme-Cadre : « Horizon 2020 », ouvert depuis janvier 2014. » se réjouit le Pr. André Syrota, Président d’Aviesan.

Ces résultats confirment l’excellente place des sciences de la vie françaises en Europe, la France étant systématiquement dans le trio de tête : le nombre de lauréats de l’ERC « starting grants » (jeunes chercheurs indépendants) et « advanced grants » (chercheurs confirmés) ayant décidé de conduire leur projet en France, sur l’ensemble du PCRD est respectivement de 108 et 72 pour les sciences de la vie.

Retrouvez le détail des résultats sur le site du Conseil européen de la recherche (ERC) : ici.

Les 19 lauréats ERC Consolidator Grants, en sciences de la vie (panel Life Sciences, LS), en France :

Eric Bapteste
Evolution Paris Seine, CNRS, Université Pierre et Marie Curie, Paris
Sequence similarity networks: a promising complement to the phylogenetic framework to study evolutionary biology

Déborah Bourc’His
Génétique et biologie du développement, Institut Curie, CNRS, Inserm, Paris
Epigenetic Control of Mammalian Reproduction

Pierre Bruhns
« Anticorps en thérapie et pathologie », Institut Pasteur, Inserm, Paris
Role of myeloid cells, their mediators and their antibody receptors in allergic shock (anaphylaxis) using humanized mouse models and clinical samples

Olivier David
« Grenoble institut des neurosciences (GIN) », Inserm, Université Joseph Fourier, CHU Grenoble, Grenoble
Functional Brain Tractography

Sonia Garel
« Institut de biologie de l’Ecole Normale Supérieure », Inserm, CNRS, Collège de France, Paris
Neural and Immune Orchestrators of Forebrain Wiring

Jean-Marc Goaillard
« Neurolbiologie des canaux ioniques et de la synapse », Inserm, Université d’Aix-Marseille, Marseille
Biophysical networks underlying the robustness of neuronal excitability

Mohamed-ali Hakimi
Laboratoire adaptation et pathogénie des micro-organismes, CNRS, Université Joseph Fourier, Grenoble
Toxoplasma gondii secretes an armada of effector proteins to co-opt its host cell transcriptome and microRNome to promote sustained parasitism

Olivier Hamant
Reproduction et développement des plantes, INRA, ENS Lyon, CNRS, Lyon
Mechanical signals in plants: from cellular mechanisms to growth coordination and patterning

Abderrahman Khila
Institut de Génomique Fonctionnelle de Lyon (IGFL), CNRS, ENS Lyon, Université Claude Bernard Lyon 1, INRA, Lyon
RNA-mediated Transcriptional Gene Silencing in Humans

Rosemary Kiernan
Institut de Génétique Humaine (IGH), CNRS, Montpellier
RNA-mediated Transcriptional Gene Silencing in Humans

Federico Mingozzi
Centre de recherche en Myologie, Université Pierre et Marie Curie, Inserm, CNRS, Paris
Molecular signatures and Modulation of immunity to Adeno-Associated Virus vectors

Antonin Morillon
Dynamique de l’information génétique : bases fondamentales et cancer, CNRS, Institut Curie, Université Pierre et Marie Curie, Paris
Dark matter of the human transcriptome: Functional study of the antisense Long Noncoding RNAs and Molecular Mechanisms of Action

Hélène Morlon
Centre de mathématiques appliquées, CNRS,  Ecole Polytechnique, Palaiseau
A partir du 01/01/2014 : Institut de biologie de l’Ecole Normale Supérieure, CNRS, ENS Paris, Inserm, Paris
Phylogenetic ANalysis of Diversification Across the tree of life

Mario Pende
« Centre de recherche croissance et signalisation », Inserm, Paris
mTOR pathophysiology in rare human diseases

Benjamin Prud’Homme
Institut de Biologie du Développement de Marseille, CNRS, Université Aix-Marseille, Marseille
Evolution of a Drosophila wing pigmentation spot, a sexual communication system

Bénédicte Françoise Py
Centre International de Recherche en Infectiologie, CNRS, Université Lyon 1 Claude Bernard, ENS Lyon, Inserm, Lyon
Regulation of inflammasome activity through NLRP3 ubiquitination level

David Robbe
« Institut de Neurobiologie de la Méditerranée (INMED) » Inserm, Marseille
Neuronal Dynamics of the Basal Ganglia and the Kinematics of Motor Habits

Maria Carla Saleh
Virologie, CNRS, Institut Pasteur, Paris
Dynamics of the RNAi-mediated antiviral immunity

Michael Weber
Biotechnologie et signalisation cellulaire, CNRS, Université de Strasbourg, Strasbourg
Identification of novel functions and regulators of DNA methylation in mammals

Leucémie : Mode d’action d’un traitement ciblé élucidé

Le mécanisme de la sénescence – ou vieillissement prématuré des cellules – peut avoir un effet anticancéreux. Ces nouveaux travaux, menés par Hugues de Thé et son équipe (université Paris Diderot/ Inserm/ CNRS/ AP-HP), sont publiés dans Nature Medecine le 12 janvier 2014. Ils révèlent que les traitements ciblés de la leucémie aiguë promyélocytaire, une forme rare de cancer du sang, induisent une cascade d’événements moléculaires qui conduit à la sénescence cellulaire et à la guérison. Ce modèle d’action pourrait être activé dans d’autres types de cancers. 

La protéine PML/RARA* est à l’origine de la prolifération des cellules cancéreuses chez les patients atteints de leucémie aiguë promyélocytaire. Les traitements ciblés déjà existants et associant une hormone – l’acide rétinoïque – et un toxique – l’arsenic – entrainent la guérison définitive de la majorité des patients, sans que l’on connaisse précisément leur action sur les cellules cancéreuses. De précédents travaux de l’équipe du Pr. Hugues de Thé ont montré que la combinaison de l’arsenic et de l’acide rétinoïque induit la destruction de la protéine PML/RARA et l’élimination des cellules souches leucémiques. Il restait à comprendre le lien entre ces deux événements.

Ces nouvelles recherches apportent les éléments nécessaires pour comprendre la guérison. Elles démontrent l’implication inattendue d’une cascade d’événements conduisant à la sénescence. L’intérêt du traitement est d’atteindre ce stade ultime de vieillissement des cellules afin de les rendre incapables de se multiplier.

Lors de ce traitement ciblé les chercheurs ont montré que la protéine p53**, arbitre entre mort cellulaire et survie, déclenche la sénescence grâce à l’implication de corps nucléaires PML. Ces structures sphériques sont présentes dans les cellules normales, mais sont désorganisées par PML/RARA dans la leucémie. Le traitement les réorganise (voir illustration ci-dessous), activant p53 et déclenchant la sénescence. Dans cette cascade d’événements (traitement, dégradation de PML/RARA, reformation des corps nucléaires, activation de p53) il suffit qu’un maillon manque pour que tous les effets thérapeutiques soient bloqués.

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Cellules leucémiques avant (gauche) et après traitement (droite). Le bleu représente l’ADN du noyau, le rouge les corps nucléaires PML. Ceux-ci sont réorganisés par le traitement PML/RARA.
©Photos transmises par le Pr. Hugues de Thé

C’est ce phénomène qui permet l’élimination des cellules malades et conduit à la guérison totale du patient, par le seul traitement combiné acide rétinoïque/arsenic. L’absence de chimiothérapie permet d’éviter beaucoup d’effets secondaires lourds.

Cette compréhension du mécanisme cellulaire et moléculaire de la guérison de la leucémie aiguë promyélocytaire ouvre des perspectives d’activation de cette même voie PML/p53 dans d’autres types de cancers.

Ces travaux ont été financés par La Ligue contre le cancer, la Fondation ARC pour la recherche sur le cancer et l’European Research Council (ERC).

* A l’origine de cette leucémie aiguë promyélocytaire, la modification de deux gènes RAR et PML qui engendrent le développement de cellules cancéreuses ;

** Le gène codant pour la protéine p53 joue un rôle essentiel dans la prolifération cellulaire à l’état normal et dans le maintien de l’intégrité du génome cellulaire.

Succès du projet CHILD-INNOVAC : passage à l’homme réussi d’un vaccin nasal contre la coqueluche

Le programme de recherche européen CHILD-INNOVAC, coordonné par l’Inserm, a permis de mettre au point un vaccin innovant, administrable par voie nasale, pour lutter contre la coqueluche qui connaît une forte recrudescence dans les pays développés ces dernières années. Le consortium de recherche, piloté par Camille Locht, directeur du Centre d’Infection et d’Immunité de Lille (Unité mixte Inserm -CNRS – Institut Pasteur de Lille – Université de Lille Nord de France), publie ce jour dans la revue en ligne PLOS ONE les résultats prometteurs des essais cliniques de phase I du vaccin chez l’Homme. 

Les chercheurs du projet européen CHILD-INNOVAC qui réunissait 10 partenaires européens* ont évalué l’efficacité et l’innocuité d’un nouveau concept de vaccination par voie nasale contre la coqueluche. Ils ont également réalisé des essais cliniques chez l’Homme qui se sont révélés probants. 

La coqueluche est une maladie injustement « oubliée », selon les termes de Camille Locht, Directeur de recherche à l’Inserm et Directeur Scientifique de l’Institut Pasteur de Lille. Or, la maladie touche plusieurs dizaines de millions de personnes et tue environ 300 000 enfants par an dans le monde. La morbidité et la mortalité associées sont en augmentation au niveau mondial. Sa recrudescence devient même inquiétante depuis 2010 dans certains pays développés comme les Etats-Unis, l’Australie, l’Angleterre, les Pays Bas et la France. 

Le projet CHILD-INNOVAC s’est concentré plus spécifiquement sur la lutte contre deux pathogènes respiratoires majeurs : Bordetella pertussis (bactérie déclenchant la coqueluche) et le virus respiratoire syncytial (virus déclenchant les bronchiolites chez les nourrissons). Ces pathogènes atteignent principalement des enfants âgés de 0 à 6 mois, mal protégés par les vaccins actuellement disponibles. Le projet a aussi fourni la preuve de concept que ce vaccin peut être appliqué à d’autres infections respiratoires.

Le chercheurs du projet CHILD-INNOVAC sont parvenus à tester pour la première fois chez l’homme un vaccin bactérien vivant, génétiquement atténué, spécialement conçu pour une administration par voie nasale pour lutter contre les pathogènes respiratoires majeurs. « Ce mode d’administration original rendra le vaccin accessible au plus grand nombre et à moindre coût. »  explique le coordinateur du projet Camille Locht.

CHILD-INNOVAC : un succès européen
Le premier succès de ce projet européen aura été de réaliser un vaccin dont l’immunogenicité et l’innocuité ont pu être testées chez l’homme en seulement deux ans et demi (contre 5 à 7 ans pour la plupart des projets de ce type). Ceci représente un temps très court que Camille Locht explique par « les compétences et la motivation du consortium qui a rassemblé les experts dans leur domaine de sept pays européens. La transmission des données aux différentes étapes du projet ont pu se faire de manière souple et efficace. » Le projet a bénéficié d’un budget de 5 millions d’euros, accordé par la Commission Européenne, dans le cadre du FP7. 

Les essais de phase I chez l’homme ont permis de mesurer l’immunogénicité et l’innocuité du vaccin, comparé à un placebo, en double aveugle. Ils se sont déroulés en Suède, où la population est la plus « naïve » vis-à-vis du vaccin contre la coqueluche, étant donné que la vaccination avait été abandonnée pendant plusieurs années dans ce pays, pour cause d’inefficacité. 
L’objectif principal de ces essais était de répertorier tous les éventuels effets secondaires : toux, éternuements, écoulements nasaux, effets sur l’état général, etc. Ces mesures ont été examinées par un comité indépendant (Independant Data Monitoring Committee).
Le second objectif était d’évaluer la prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale et le déclenchement d’une réponse immunitaire.
Trois doses différentes du vaccin ont pu être testées : une faible, une intermédiaire et une forte dose.
Après 6 mois de suivi des sujets vaccinés et l’analyse de 60 000 données, les résultats ont montré que le vaccin ne présentait aucun effet secondaire comparé au placebo, même à forte dose. La prise du vaccin au niveau du nez s’est révélée meilleure avec la forte dose. De plus, chez tous les sujets chez qui le vaccin avait pris, des réponses immunitaires ont été déclenchées. « Ce qui est particulièrement intéressant était qu’une seule administration nasale pouvait induire une réponse immunitaire qui se maintenait au moins pendant 6 mois, c’est-à-dire aussi longtemps que l’étude. » commente Camille Locht. 

La prochaine étape consistera à administrer des volumes plus élevés pour tenter d’augmenter le taux de prise du vaccin au niveau de la muqueuse nasale. L’ambition de Camille Locht et de ses collaborateurs est aussi d’améliorer la stabilité du vaccin dans le temps, dans l’objectif d’un prochain développement industriel. 

Inserm Transfert, en charge de la valorisation de la propriété intellectuelle liée à la technologie BPZE, a récemment conclu un accord avec un partenaire industriel pour développer cette dernière.

Pour en savoir plus

CHILD-INNOVAC

Le projet CHILD-INNOVAC visait à développer des vaccins innovants par voie nasale, contre les deux principaux agents pathogènes respiratoires qui sont la coqueluche et le virus respiratoire syncytial (VRS). Le projet a fourni des prototypes de vaccins multivalents, administrables par voie nasale sur la base de B.pertussis atténué. L’immunité induite par le vaccin BPZE1 a été étudiée en détail, ainsi que sa stabilité et sécurité génétique et biologique.
CHILD-INNOVAC a démarré en 2008 et a été soutenu par l’Union Européenne (FP7) pendant 4 ans. Il était coordonné par l’Inserm, comme 27 autres projets européens. Le projet impliquait 10 partenaires, dont 2 sociétés privées et 8 laboratoires, basés dans 7 pays européens :

Inserm (coordinateur), France : http://www.inserm.fr/
Inserm Transfert, France : http://www.inserm-transfert.fr/
Université Libre de Bruxelles, Belgique : http://www.ulb.be/
Innogenetics, Belgique : http://www.innogenetics.com
National University of Ireland-Maynooth, Irlande : www.immunology.nuim.ie
Istituto Superiore Di Sanità, Italie : http://www.iss.it/
Swedish Institute for Infectious Disease Control, Suède : http://www.smittskyddsinstitutet.se/in-english/
Netherlands Vaccine Institute, Pays-Bas 
National Institute for Public Health and the Environment, Pays-Bas : http://www.rivm.nl/
Imperial College of Science, Technology and Medicine, Angleterre : http://www3.imperial.ac.uk/

Le projet EUCelLEX, pour évaluer les enjeux sociétaux soulevés par l’utilisation de la médecine régénérative en Europe

Le projet de recherche européen EUCelLEX (Cell-based regenerative medicine: new challenges for EU legislation and governance), coordonné par l’Inserm, vient d’obtenir un financement de 500 000 € de l’Union européenne, pour une durée de 3 ans. Le projet consiste à dresser l’état des lieux de l’application des règles européennes en matière de banques de cellules ainsi que des pratiques actuelles concernant l’utilisation thérapeutique des cellules humaines selon les pays. L’objectif est de fournir des éléments factuels à la Commission européenne pour permettre l’élaboration de mesures législatives qui soient en adéquation avec les progrès médicaux dans ce domaine. Les 9 équipes de chercheurs réparties en Europe et au Canada se sont réunies à Paris dans les locaux du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), le 04 décembre pour le lancement du projet. 

Les biobanques : l’avenir de la médecine régénérative

Les échantillons biologiques humains sont considérés aujourd’hui comme des éléments essentiels à l’avancement des sciences du vivant et de la médecine. Les données issues de l’analyse de ces échantillons permettent de mieux comprendre les maladies et ainsi de proposer des pistes thérapeutiques, notamment dans le champ de la médecine régénérative[1]. Leur collecte, leur stockage, leur transformation et leur distribution sont assurés par les biobanques, acteurs clés du transfert des connaissances scientifiques vers la pratique médicale. Grâce à ces banques de données biologiques, les chercheurs vont pouvoir identifier de nouveaux biomarqueurs cliniques et développer de nouvelles approches thérapeutiques telles que la médecine régénérative. Dans ce domaine, la recherche sur les cellules souches continue d’être prometteuse car elle a pour vocation de stimuler la capacité d’auto-guérison du corps.

Nécessité d’encadrer juridiquement l’utilisation des échantillons biologiques humains au niveau européen

Entre 2004 et 2006, l’Union européenne a adopté trois directives relatives aux cellules et tissus humains afin d’harmoniser leur acquisition, leur stockage et leur emploi à visée thérapeutique. Ces directives s’appliquent spécifiquement aux banques de tissus et de cellules, y compris de cellules souches et de cellules de sang de cordon, utilisées pour la médecine régénérative. Néanmoins, elles ont été mises en œuvre d’une façon très hétérogène d’un pays à l’autre. « Actuellement, les instruments juridiques européens sur l’utilisation des cellules souches adultes et embryonnaires à des fins de recherche par les acteurs publics et privés ne permettent pas un partage efficient de ces ressources au sein de l’Europe, ce qui peut être un obstacle à l’avancée de la recherche. » explique Emmanuelle Rial-Sebbag, coordinatrice du projet EUCelLEX.

De plus, les évolutions scientifiques de l’utilisation des cellules humaines s’articulent autour de nouveaux enjeux légaux et institutionnels. Notamment, le développement des infrastructures de recherches au niveau européen (BBMRI-ERIC, FCrin[2]) réinterroge la pertinence de ce cadre face à une pratique médicale en pleine évolution devant également tenir comptes des enjeux de santé publique. On constate donc aujourd’hui un élargissement des champs de questionnement posés et par voie de conséquence, une inadéquation de la législation européenne au regard de la recherche sur ces cellules. Il faut ajouter que certaines parties du processus de translation de la connaissance fondamentale jusqu’à la mise sur le marché de nouveaux produits sont inégalement régulées soit par les législations nationales des Etats membres, soit par l’Europe.

Les objectifs du projet EUCelLEX

C’est dans ce contexte que le projet EUCelLEX s’est donné pour objectif principal de dresser un état des lieux de la législation actuelle concernant l’usage thérapeutique des cellules somatiques, tant dans le secteur public que dans le privé et dans plusieurs pays européens.

Pour ce faire, le projet se propose d’évaluer la pertinence des instruments juridiques européens actuels afin de fournir des éléments pour l’élaboration d’un cadre juridique européen pour l’utilisation des cellules souches de toute nature (embryonnaires, adultes, IPS, issues du sang de cordon), à la lumière des récents développements scientifiques, juridiques et institutionnels qui ont eu lieu au sein de l’Europe. Afin de donner une image complète de la situation européenne cette étude juridique se complètera d’analyses de pratiques professionnelles ainsi que des recommandations éthiques prodiguées en Europe. Partant du constat que l’ensemble du processus translationnel, de la recherche à la mise sur le marché d’un produit, n’est que partiellement couvert par les règles de l’Union européenne, les équipes devront explorer l’hétérogénéité induite dès lors par la large marge de manœuvre laissée aux Etats.

Dans un premier temps les partenaires du projet vont chacun dans leur pays analyser les instruments juridiques et les politiques quant à l’utilisation des cellules souches au niveau national et européen.

Puis, ils compareront la réglementation en vigueur avec les pratiques qui permettront de développer des cellules souches dans un proche avenir, en particulier dans les infrastructures de recherche, afin de mettre en évidence les lacunes et proposer des solutions durables. Un intérêt particulier sera également porté aux pratiques émergentes telles que le « tourisme cellulaire » ou encore l’utilisation de thérapies non-éprouvées. Par exemple, dans certains pays d’Europe des médecins proposent de mettre en œuvre des techniques de médecine régénérative, techniques qui ne sont pas encore validées scientifiquement et qui ne répondent pas aux critères de sécurité imposés par la législation européenne et française.

L’objectif final est de fournir des recommandations à la Commission européenne afin de faciliter l’utilisation de cellules souches pour la santé dans un environnement juridique stabilisé.

Les résultats du projet pourront ainsi favoriser l’innovation dans la recherche et aider la Commission européenne à élaborer des mesures législatives spécifiques à ce domaine.

Les 4 phases du projet EUCelLEX :

1. Recueillir des informations sur la mise en œuvre juridique de la directive sur les tissus et les cellules, en se focalisant sur ​​ce qui est réglementé au niveau européen et ce qui est encore réglementé au niveau national.

2. Intégrer ces connaissances dans un cadre d’analyse plus large couvrant l’ensemble du domaine, allant de la recherche jusqu’aux soins, avec un focus sur les cellules souches et les banques de sang de cordon.

3. Faire une analyse de fond incluant la législation, la littérature, la jurisprudence et la collecte des opinions sur les aspects éthiques.

4. Créer des outils pour la participation des professionnels et des acteurs clés aux questionnements soulevés par l’utilisation des cellules souches.

Les chercheurs partenaires du consortium EUCelLEX répartis dans toute l’Europe et au Canada, vont mettre à profit leurs expertises scientifique, juridique et éthique au service de la mise en lumière des enjeux soulevés par l’utilisation des cellules souches pour la médecine de demain.

EUCelLEX – Cell-based regenerative medicine: new challenges for EU legislation and governance

Médecine régénérative à base de cellules : nouveaux défis pour la législation européenne et la gouvernance. (Référence : 601806)

Le projet EUCelLEX débute le 04 décembre 2013 et est soutenu par l’Union européenne (FP7) pendant 3 ans. Il est coordonné par l’Inserm et implique 9 partenaires, basés dans 7 pays européens, et au Canada :

Inserm (coordinateur), France : http://www.inserm.fr/
Leibniz Universitaet Hannover, Allemagne : http://www.uni-hannover.de/en/index.php
Central European University, Budapest, Hongrie : http://www.ceu.hu/
Legal pathway, Pays-Bas
Oxford University, Royaume-Uni : http://www.ox.ac.uk/
Medical University of Graz, Autriche : http://www.meduni-graz.at/en/
Fondation Nationale des Sciences Politiques, France : http://www.sciencespo.fr/
KU Leuven, Belgique : http://www.kuleuven.be/english/
McGill University, Canada : http://www.mcgill.ca/fr


[1] La médecine régénérative est un champ de recherche interdisciplinaire dont les applications cliniques sont axées sur la réparation, le remplacement ou la régénération des cellules, tissus ou organes pour restaurer une fonction altérée, quelle qu’en soit la cause, y compris les anomalies congénitales, les maladies, les traumatismes et le vieillissement. Elle utilise une combinaison de plusieurs approches technologiques visant à remplacer les greffes traditionnelles.

[2] Biobanking and Biomolecular Resources Research Infrastructure – European Research Infrastructure Consortium, French Clinical Research Infrastructure Network

Un pas vers la chronothérapie personnalisée pour le traitement du cancer

La chronothérapie des cancers consiste à administrer les traitements à une heure optimale. En effet l’efficacité des médicaments anticancéreux peut doubler, et leur toxicité diminuer de cinq fois selon l’heure d’administration, car l’organisme est régi par des rythmes biologiques précis. Cependant, il existe d’importantes différences de rythmes biologiques entre les individus que la chronothérapie ne savait pas encore prendre en compte. Une étude internationale menée chez des souris par des chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de l’université Paris-Sud[1] vient d’ouvrir la voie à la personnalisation de la chronothérapie. Dans un article qui vient d’être publié dans la revue Cancer Research, les chercheurs ont montré que l’heure de tolérance optimale à l’irinotécan, médicament anticancéreux largement utilisé, varie de 8 heures selon le sexe et le fonds génétique des souris. Ils ont ensuite construit un modèle mathématique permettant de prévoir, pour chaque animal, l’heure optimale d’administration du médicament. Ils comptent désormais tester ce modèle pour d’autres molécules utilisées en chimiothérapie.

Le métabolisme de l’organisme est rythmé sur 24 heures par l’horloge circadienne. De ce fait, à certains moments précis de la journée ou de la nuit, un médicament donné peut s’avérer plus toxique pour les cellules cancéreuses et moins agressif pour les cellules saines. La chronothérapie des cancers, découverte il y a une vingtaine d’années par Francis Lévi part de ce principe pour améliorer l’efficacité des chimiothérapies. Ses recherches ont montré que l’efficacité des médicaments pouvait doubler selon l’heure à laquelle ils sont administrés. De plus, c’est à cette heure optimale que les médicaments se révèlent aussi jusqu’à 5 fois moins toxiques pour l’organisme.

Cependant, les recherches indiquent la nécessité de personnaliser la chronothérapie. En effet, les rythmes biologiques peuvent changer d’un individu à l’autre. Si, pour 50% des patients l’heure optimale est la même, les 50% restants sont soit en avance soit en retard sur cette heure. L’équipe menée par Francis Lévi a voulu mieux comprendre les facteurs qui jouent sur ces différences dans les rythmes biologiques.

Pour cela, les chercheurs ont étudié la toxicité de l’irinotécan, médicament anticancéreux très utilisé dans le traitement du cancer du côlon et du pancréas, en fonction de l’heure d’administration chez des souris mâles et femelles de 4 souches. Ils ont ainsi pu observer, pour la première fois, que l’heure de meilleure tolérance au traitement variait jusqu’à huit heures d’un groupe de rongeurs à l’autre, selon leur sexe et leur patrimoine génétique.

Les chercheurs ont ensuite voulu trouver une méthode permettant de prévoir cette heure optimale indépendamment du sexe et du patrimoine génétique. Pour cela, ils ont mesuré l’expression de 27 gènes dans le foie et le côlon au cours des 24 heures. Ces mesures ont été analysées selon une méthodologie issue de la biologie des systèmes. Les chercheurs ont ainsi construit et validé un modèle mathématique permettant de prédire précisément l’heure à laquelle l’irinotécan est le moins toxique pour l’organisme grâce à la courbe d’expression de deux gènes, appelés Rev-erbα et Bmal1, qui rythment le métabolisme et la prolifération des cellules.

Les chercheurs veulent à présent valider ce modèle pour d’autres molécules utilisées en chimiothérapie. Au-delà de l’expression des gènes, ils voudraient aussi trouver d’autres paramètres physiologiques liés à l’horloge biologique permettant de prédire l’heure optimale des traitements pour chaque patient. Ces travaux devraient permettre d’accroître l’efficacité et la tolérance des traitements, mais aussi améliorer considérablement la qualité de vie des malades.

Ce projet a notamment été financé par l’Union européenne (7ème programme cadre) et le consortium d’agences européennes ERASYSBIO+.


[1] Piloté par l’Unité Rythmes biologiques et cancers (Inserm/Université Paris-Sud), ce travail a également impliqué l’Institut de biologie de Valrose (CNRS/Inserm/Université de Nice Sophia Antipolis), le Laboratoire des signaux et systèmes (CNRS/Supélec/Université Paris-Sud) ainsi que l’Institut de pharmacologie de Milan.

FIBRO-TARGETS – L’Europe mise sur la fibrose du myocarde comme cible thérapeutique de l’insuffisance cardiaque

L’Union Européenne vient d’accorder un financement au projet de recherche FIBRO-TARGETS (Targeting cardiac fibrosis for heart failure treatment), coordonné par l’Inserm sur une durée de 4 ans. L’objectif est de déterminer les mécanismes susceptibles de devenir des cibles thérapeutiques de la fibrose interstitielle myocardique responsable de l’insuffisance cardiaque. FIBRO-TARGETS rassemble 11 partenaires européens, organismes publics de recherche et industriels, répartis dans 6 pays. Il s’agit du second projet que l’Inserm coordonne sur l’insuffisance cardiaque après celui lancé en février dernier : HOMAGE (Heart OMics in AGEing – valider les biomarqueurs spécifiques de l’insuffisance cardiaque).
Les 11 partenaires se sont réunis à Amsterdam le 03 septembre pour le lancement du projet FIBRO-TARGETS.

Centre d'Investigation Clinique Plurithématique (CIC-P) Pierre D

© Inserm / P. Delapierre

Suite à une maladie du muscle cardiaque, le cœur subit un remodelage dont la fibrose interstitielle myocardique est un des mécanismes clés. Cette fibrose se caractérise par une modification de la structure du tissu cardiaque qui devient plus rigide. Elle résulte de l’accumulation excessive des protéines constituant la matrice extracellulaire et de modifications de leurs propriétés. Ce remodelage matriciel altère les fonctions diastolique et systolique aboutissant, à terme, à l’insuffisance cardiaque, dont les symptômes sont : essoufflement, congestion, œdèmes et fatigue.

L’insuffisance cardiaque est une maladie grave car souvent irréversible et on estime à plus de 6.5 millions le nombre de personnes atteintes en Europe.

Elle est la cause première d’hospitalisation chez les sujets âgés de plus de 65 ans. Sa fréquence est en progression alarmante du fait du vieillissement de la population et de l’explosion des facteurs de risques cardiovasculaires (diabète, obésité, hypertension artérielle). Intervenir très tôt sur des mécanismes majeurs dont la fibrose interstitielle myocardique pourrait ralentir la progression vesr l’insuffisance cardiaque et son aggravation.

« Jusqu’à présent, le seul moyen de quantifier la fibrose est la biopsie, méthode invasive et peu précise pour estimer le degré de fibrose totale. Depuis une dizaine d’années, l’imagerie cardiaque permet une bonne évaluation anatomique et fonctionnelle du myocarde. Mais ces deux méthodes restent non prédictives.

C’est donc l’enjeu du projet FIBRO-TARGETS qui propose une approche innovante permettant une détection précoce d’anomalies cardiaques aux moyens de marqueurs de la fibrose interstitielle myocardique. »

 explique le Professeur Faiez Zannad, chercheur de l’unité Inserm U1116, Centre d’Investigation Clinique P. Drouin Inserm 9501 à Nancy, coordinateur des projets FIBRO-TARGETS et HOMAGE.

Grâce aux nombreuses données rassemblées par le consortium FIBRO-TARGETS, la fibrose interstitielle myocardique a été identifée comme une cible thérapeutique majeure pour la prévention et le traitement de l’insuffisance cardiaque. Le projet FIBRO-TARGETS vise donc à identifier précisément les mécanismes principaux impliqués dans la fibrose interstitielle myocardique et à concevoir des approches thérapeutiques ayant pour cible certains de ces mécanismes. Les fibroblastes cardiaques (cellules spécifiques du muscle cardiaque) représentent 60 à 70% des cellules cardiaques et sont la principale source de production des protéines extracellulaires responsables de la fibrose. Ces mécanismes étant identifiés, il s’agit donc d’intervenir directement sur la prolifération des fibroblastes et la synthèse de la matrice extra-cellulaire avec des molécules d’intérêt thérapeutique pour la prévention, la réparation ou le ralentissement du remodelage cardiaque.

Les objectifs de FIBRO-TARGETS sont premièrement de confirmer les principaux mécanismes biologiques impliqués dans la fibrose interstitielle myocardique. Puis, il s’agira de valider expérimentalement de nouvelles molécules et stratégies thérapeutiques ciblées visant à améliorer la qualité de la matrice cellulaire et limiter la fibrose interstitielle myocardique. Cela permettra ensuite d’établir des scénarios cliniques potentiels afin de traiter l’insuffisance cardiaque. Enfin, les cibles pourront être utilisées comme biomarqueurs pour prédire et qualifier la réponse aux traitements contre la fibrose interstitielle myocardique.

Pour atteindre ces objectifs, les chercheurs européens tenteront d’élucider aux cours d’études de physiologie et pharmacologie expérimentales, de biologie moléculaire et de chimie pharmaceutique, les mécanismes de la fibrose interstitielle cardiaque à partir de modèles in vitro et in vivo existant et/ou développés au cours du projet. Ils valideront également la pertinence des nouvelles approches thérapeutiques développées au cours du projet. La deuxième étape, translationelle, consistera à classer les patients à risque qui sont les plus susceptibles de répondre aux thérapies ciblées selon une médecine personnalisée. Cette classification en groupes de patients se fera selon des profils déterminés en utilisant l’imagerie et des marqueurs circulant associés aux nouvelles cibles proposées.

L’aboutissement de FIBRO-TARGETS participera à la résolution d’un problème de santé publique majeur du 21ème siècle affectant particulièrement les personnes âgées.

Pauvre ou riche (en bactéries intestinales) : pas tous égaux face aux maladies liées à l’obésité

Deux études publiées simultanément dans Nature le 29 août 2013 ouvrent des perspectives importantes dans le domaine de la médecine préventive et personnalisée. Conduites par l’Inra conjointement avec l’Inserm, l’UPMC et l’AP-HP ainsi qu’avec le CNRS, l’IRD, l’université d’Evry et des partenaires internationaux, ces études ont permis de distinguer pour la première fois, au sein d’une population, deux groupes d’individus différant par la faible ou forte richesse de leur flore intestinale (encore appelé microbiote intestinal) et par leur susceptibilité face aux maladies métaboliques liées à l’obésité. Les chercheurs ont ainsi observé que les individus ayant un déficit en bactéries intestinales (appauvrissement de la diversité) ont un risque accru de développer des complications liées à l’obésité. Parallèlement, ils ont réussi à améliorer la composition du microbiote grâce à un régime alimentaire spécifique. Il serait ainsi possible de développer un test simple d’identification de ces personnes à risque et de proposer une solution préventive adaptée.

Centre Biomédical recherche et de valorisation

© Inserm

L’épidémie d’obésité touchait environ 400 millions d’individus adultes en 2005, elle concernera plus de 700 millions de personnes en 2015 et continuera d’augmenter. Les causes sont en partie environnementales (vie sédentaire, nourriture riche en énergie et facile à se procurer,…) et en partie génétiques. Mais l’obésité liée à des mutations génétiques humaines semble représenter une minorité de cas. De plus en plus de données indiquent que des variations dans notre « autre génome », le microbiome, c’est-à-dire le génome global de tous les microorganismes de notre corps, peuvent avoir plus de conséquences sur le développement de l’obésité que des variations dans le génome humain.

Deux types d’individus selon la composition bactérienne du tractus digestif

Une première étude menée par le consortium international MetaHIT* a porté sur une cohorte de 292 adultes danois comprenant 123 personnes non-obèses et 169 obèses. Les chercheurs ont analysé le génome bactérien intestinal de ces individus grâce à une nouvelle technique appelée métagénomique quantitative. D’après les résultats, il ressort que deux groupes d’individus se distinguent selon le nombre de gènes microbiens différents de leur microbiote, ce qui correspond à la richesse des bactéries qu’ils portent et l’abondance de certaines espèces bactériennes intestinales. Un quart des individus de la cohorte sont « pauvres » en espèces bactériennes, tandis que les trois-quarts possèdent une flore intestinale « riche » en bactéries (c’est-à-dire plus diversifiée). C’est la première fois qu’une telle distinction est mise en évidence dans la population. Par ailleurs, cette distinction n’est pas dépendante de la corpulence des individus car on retrouve des maigres et des obèses dans les deux groupes, même si le groupe déficitaire en bactéries comprend plus d’obèses (80%).

Un risque accru de complications associées à l’obésité

En comparant ces deux groupes, les chercheurs ont découvert que les personnes pauvres en bactéries intestinales ont un risque plus important que les personnes riches en bactéries de développer des complications liées à l’obésité :

 diabète de type 2, problèmes lipidiques, hépatiques, cardiovasculaires  et peut-être certains cancers… Ces individus ont notamment tendance à développer une inflammation chronique.

Des espèces bactériennes limitant la prise de poids

Les chercheurs ont également observé que les personnes obèses du groupe déficitaire en espèces bactériennes prennent plus de poids dans le temps que les individus non obèses. Chez ces individus pauvres en bactéries, 8 espèces bactériennes spécifiques étaient en faible abondance, voire manquantes. Ces espèces pourraient avoir un rôle protecteur contre la prise de poids. Cette découverte pourrait, à terme, conduire au développement de nouveaux probiotiques permettant de lutter contre la prise de poids.

6 espèces bactériennes suffisent à différencier les « pauvres » des « riches »

La seconde étude menée par le consortium français MicroObes*, portant sur une cohorte de 49 adultes français obèses ou en surpoids, confirme les résultats de la première étude. Les communautés bactériennes pauvres et riches dans les deux populations françaises et danoises sont similaires. De plus, en se basant sur seulement 6 espèces bactériennes particulièrement représentatives de ces communautés, il est possible de distinguer les communautés riches des communautés pauvres en bactéries avec une précision de 95%. Ces résultats pourraient conduire à l’élaboration d’une méthode simple pour déterminer quel type de communauté microbienne intestinale un individu porte.

Un régime alimentaire permet d’enrichir le microbiote

L’étude des patients français a de plus porté sur l’impact d’un régime riche en protéine et en fibres, et pauvre en calories, sur la diversité génétique du microbiote intestinal. Ce régime a conduit, après 6 semaines, non seulement à l’amélioration attendue des caractéristiques cliniques des individus étudiés (perte de poids et modifications des paramètres métaboliques), mais aussi à une augmentation de la richesse des communautés bactériennes intestinales initialement pauvres. Les chercheurs ont ainsi pu corréler l’augmentation de la richesse bactérienne avec la réduction du poids, du tissu graisseux, et avec une amélioration de paramètres métaboliques (taux de triglycéride ou cholestérol) ou inflammatoires. La voie est ouverte non seulement au diagnostic des individus à risque mais également à l’intervention par des recommandations nutritionnelles.

Cependant, l’inflammation chronique n’a pu être corrigée par le régime chez les individus pauvres en espèces bactériennes aussi efficacement que chez les individus riches. Ce problème ne pourra être résolu qu’en mettant en œuvre d’autres interventions, peut-être de type médicamenteuses, facilitées par la distinction des individus en fonction de la composition de leur microbiote intestinal.

L’ensemble des signes cliniques liés à l’obésité pourraient être corrigés, ou encore mieux prévenus, par la détection précoce de l’altération du microbiote et grâce à des recommandations nutritionnelles adaptées. Une telle voie, esquissée par ces deux études, pourrait conduire à une médecine préventive des maladies chroniques,  alternative à la médecine curative dont le poids sur les sociétés industrialisées devient financièrement difficile à soutenir. C’est dans cette perspectives que travaillent actuellement les chercheurs du programme européen Metacardis (Metagenomics in Cardiometabolic Diseases), débuté en 2012 et soutenu par l’Europe pour une durée de 5 ans (cf. encadré ci-dessous).

* Trois consortia de recherche sur le microbiote intestinal humain

MetaHIT (METAgenomics of the Human Intestinal Tract) est un programme de recherche européen, coordonné par l’Inra, qui s’est terminé en juin 2012. Il rassemblait 14 organismes de recherche et industriels européens (France, Allemagne, Danemark, Espagne, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni) et la Chine. http://www.metahit.eu/

MicroObes (Microbiome intestinal humain dans l’obésité et la transition nutritionnelle) est un programme de recherche de l’ANR, coordonné par l’Inra, qui s’est terminé en janvier 2011 et regroupait 5 unités de recherche appartenant à l’Inra, l’Inserm, l’APHP, le CEA. http://www7.inra.fr/micro_obes/le_projet

Metacardis est un programme de recherche européen actuellement en cours, dans la continuité des projets précédents. Coordonné par l’Inserm, il a débuté en novembre 2012 et vise à étendre l’étude du rôle de la flore Intestinale dans les complications cardiométaboliques de l’obésité et à développer des applications cliniques. Il implique 14 partenaires issus de 6 pays européens. http://www.metacardis.eu

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