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Des mécanismes épigénétiques spécifiques aux femmes pourraient contribuer à la progression tumorale

Photo d'imagerie en microscopie électronique montrant la transformation des cellules mammaires tumorales dans le cancer du sein

Transformation des cellules mammaires tumorales dans le cancer du sein. Crédits / Inserm – Xavier Coumoul

Des travaux décrivent le rôle épigénétique[1] d’un ARN non-codant dans le développement de tumeurs agressives, notamment dans le cancer du sein. L’étude, menée en collaboration entre l’Institut Curie, l’Inserm, le CNRS, l’Institut Paoli Calmettes, Aix-Marseille Université[2], vient d’être publiée dans la revue Cell. Ces résultats pourraient expliquer plus largement des biais de genre dans la prédisposition à certaines pathologies.

Tous les mammifères disposent de deux chromosomes sexuels. Les mammifères femelles possèdent deux chromosomes X, contrairement aux mâles qui ont un chromosome X et un Y. On connaissait déjà le rôle d’un ARN non-codant spécifique, appelé XIST, pour initier l’inactivation d’un des deux chromosomes X de la femelle. Le but de cette inactivation :  bloquer la double expression des gènes situés sur ce chromosome car celle-ci affecte la viabilité des cellules. Dans cette nouvelle étude, les scientifiques démontrent que XIST joue non seulement un rôle pour déclencher cette inactivation du chromosome X mais aussi pour la maintenir tout au long de la vie des cellules.

Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs et chercheuses ont étudié in vivo les effets de la suppression de XIST. Plusieurs techniques ont été utilisées pour cela. « Soit on a utilisé des outils génétiques pour bloquer l’expression de XIST, soit on a utilisé des techniques de CRISPR[3] pour interférer avec l’expression et on a rendu le gène de XIST silencieux », explique Raphaël Margueron, chercheur à l’Inserm et chef de l’équipe « Mécanisme de répression par les protéines Polycomb » à l’Institut Curie dans l’unité « Génétique et biologie du développement » (Institut Curie/CNRS/Inserm/Sorbonne Université).

La perte de XIST dans les lignées cellulaires étudiées[4] a un effet important sur l’homéostasie[5] du tissu mammaire et impacte le développement tumoral. Raphaël Margueron précise que « quand on étudie des tumeurs et qu’on regarde après coup quelles étaient les propriétés de ces tumeurs, on voit qu’il y a une tendance à ce que XIST soit absent des tumeurs du sein les plus agressives. Ainsi qu’une réactivation d’un certain nombre de gènes du X inactif ».

Des gènes réactivés et la transcription s’emballe

Parmi les gènes réactivés par la perte de XIST, les chercheurs ont mis en évidence le gène codant pour MED14, une sous-unité essentielle au sein du complexe protéique Médiator. Celui-ci joue un rôle dans le contrôle de l’expression des gènes. 

 

 

En conséquence, une augmentation de l’expression de MED14 va impacter l’activité de Médiator et contribuer à la perturbation de la différenciation des cellules souches mammaires[6]. Il s’agit potentiellement du résultat d’une augmentation de l’activation des enhancers (voir FOCUS ci-dessous).

En conclusion, la perte de XIST entraîne la réactivation de certains gènes (sur le chromosome X inactif) impliqués dans la différentiation des cellules et impacte le développement de cellules tumorales agressives. Ce mécanisme épigénétique étant spécifique à la présence de deux chromosomes X, ces résultats vont jouer un rôle majeur dans l’étude des prédispositions aux pathologies liées au genre de l’individu.

« Cette étude suggère que l’expression de XIST ainsi que de certains gènes liés au chromosome X pourraient être utilisés comme marqueurs de réponse à de nouvelles stratégies thérapeutiques », développe Christophe Ginestier, chef de l’équipe Inserm « Cellules Souches Epithéliales et Cancer » au Centre de recherche en cancérologie de Marseille.

 

Focus : Initiation de la transcription

« L’expression des gènes est contrôlée par les promoteurs mais aussi par des morceaux d’ADN, qui peuvent être assez distants du gène et du promoteur, qu’on appelle les enhancers. Il y a une communication entre les enhancers et les promoteurs. Le complexe Médiator intervient dans cette communication et permet aux enhancers de réguler finement l’expression des gènes. », explique Raphaël Margueron.

 

[1]  L’épigénétique est une discipline qui étudie les mécanismes intervenant dans la régulation des gènes, essentielle à l’action des cellules et au maintien de leur identité.

[2] Les travaux ont été menés dans l’unité de recherche « Génétique et biologie du développement » (Institut Curie, CNRS, Inserm, Sorbonne Université) par l’équipe « Mécanisme de répression par les protéines Polycomb » de Raphaël Margueron ; au Centre de Recherche en Cancérologie de Marseille (CRCM / Inserm, CNRS, Aix-Marseille Université, Centre de Lutte Contre le Cancer de la région PACA-Institut Paoli-Calmettes) par l’équipe d’Emmanuelle Charaffe-Jauffret et de Christophe Ginestier et avec l’EMBL à Heidelberg (Edith Heard).

[3] La technique CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats) consiste à interrompre ou suspendre l’expression d’un gène en le ciblant de manière précise.

[4] Le tissu mammaire contient des canaux composés de cellules basales et luminales. Les lignées cellulaires choisies permettent de reproduire cette hétérogénéité du tissu.

[5] Maintien de l’équilibre entre le milieu intérieur et extérieur.

[6] La différenciation est la capacité d’une cellule à acquérir une fonction propre. Une cellule souche peut devenir n’importe quelle cellule (musculaire, excrétrice, osseuse, etc.) mais c’est sa localisation (donc son environnement et les facteurs de transcription qu’on y trouve) qui va déterminer son devenir.

Autorisation de mise sur le marché américain d’une molécule issue de la recherche française contre le syndrome de CLOVES et les syndromes apparentés

Co-marquages de peau de souris exprimant une mutation du gène PIK3CA. ©Marina Firpion/Guillaume Canaud – unité 1151 Inserm

L’AP-HP, l’Inserm et Université Paris Cité félicitent les équipes du Pr Guillaume Canaud (hôpital Necker – Enfants malades AP-HP /  INEM – Centre de Médecine Moléculaire – Inserm / Institut Imagine / Université Paris Cité) pour leurs travaux sur l’alpelisib (BYL719) dont l’agence américaine du médicament (FDA) vient d’autoriser la mise sur le marché comme premier et unique traitement pour les patients adultes et pédiatriques de 2 ans et plus atteints du spectre de prolifération liée à une mutation du gène PIK3CA (PROS).

Cette autorisation s’appuie sur les résultats de l’étude EPIK-P1 en données réelles menée par les équipes du Pr Guillaume Canaud (hôpital Necker – Enfants malades AP-HP / INEM Centre de Médecine Moléculaire – Inserm / Institut Imagine / Université Paris Cité) – Promotion Novartis et dont il était l’investigateur principal.

Cette étude rétrospective menée chez 57 patients, dont 44 hospitalisés à l’hôpital Necker – Enfants malades AP-HP, a montré l’efficacité de l’alpelisib (médicament utilisé dans le cancer du sein) dans les syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse liés à des mutations activatrices de la voie PIK3CA et également que les patients traités avec cette molécule ont connu une réduction du volume de la lésion cible et une amélioration significative des symptômes et des manifestations liées au PROS2.

Cette étude faisait suite aux travaux menés entre 2016 et 2018 démontrant l’intérêt majeur de cette stratégie thérapeutique pour les patients du syndrome de CLOVES (Congenital Lipomatous Overgrowth, Vascular Malformation, Epidermal Nævi) ou de troubles apparentés qui ont vu leur état de santé et leur qualité de vie s’améliorer de manière significative.

Ils avaient été conduits en preuve de concept chez la souris puis chez 19 patients, adultes et enfants, suivis à l’hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP et souffrant de ce syndrome. Les résultats avaient été publiés dans la revue Nature3.

Depuis 2016, un peu plus de 150 patients ont été traités dont deux nourrissons qui ont fait l’objet d’une étude récemment publiée4 .

Les patients souffrant du syndrome de CLOVES (Congenital Lipomatous Overgrowth, Vascular Malformation, Epidermal Nævi) ou de troubles apparentés présentent des déformations majeures et des tuméfactions vasculaires dues à des mutations d’un gène, appelé PIK3CA.

Dans les formes les plus graves, il existe des excroissances de tissu graisseux, des malformations vasculaires, une scoliose, des manifestations touchant le squelette comme un élargissement majeur des os ou encore des déformations d’organes tel que le cerveau ou les reins.

Jusqu’à présent aucun traitement curatif n’était disponible pour ces patients dont le pronostic pouvait être engagé à court ou moyen terme et pour lesquels, les seules options thérapeutiques consistaient en des traitements symptomatiques, et pour les cas les plus graves, à subir des embolisations ou des chirurgies mutilantes pour préserver les organes ou les membres sains.

Cette décision de la FDA récompense le travail inédit d’un médecin chercheur, Guillaume Canaud, qui a identifié une molécule prometteuse, démontré avec son équipe de recherche l’effet bénéfique sur un modèle expérimental développé par leurs soins, traité une cohorte de patients (dont des enfants) avec des résultats prometteurs confirmés ensuite par nombreuses équipes à travers le monde puis par l’essai EPIK-P1 et enfin obtenu, grâce à ces données de vie réelle, une autorisation de mise sur le marché américain.

« Je suis fier de cet aboutissement exceptionnel qui va offrir une possibilité de traitement médicamenteux pour les patients atteints de syndrome de surcroissance ou d’anomalies vasculaires liées à une mutation PI3KCA. Il s’agit du fruit d’un travail pour lequel de multiples équipes de l’hôpital Necker – Enfants malades AP-HP mais également au sein du laboratoire de recherche (Institut Necker – Enfants malades AP-HP – Université Paris Cité) ont travaillé main dans la main avec le laboratoire propriétaire de la molécule (Novartis), les associations de patients et la FDA. Les résultats de l’étude EPIK-P1 découlent de nos découvertes précliniques antérieures. », indique le Pr Guillaume Canaud. « Il s’agit d’une avancée majeure pour l’amélioration de la prise en charge des patients. »

Pour Christine Clerici, présidente de Université Paris Cité « C’est d’abord une excellente nouvelle pour les patients atteints du syndrome de Cloves qui vont enfin pouvoir bénéficier d’un traitement grâce à cette décision majeure de la FDA. C’est également, de la part de communauté scientifique internationale, une importante marque de reconnaissance de la qualité de la recherche et  de l’enseignement français, porteurs d’innovation ! Nous adressons toutes nos  félicitations au Pr. Guillaume Canaud d’Université Paris Cité  et à ses collaborateurs pour cette avancée thérapeutique majeure.»

Pour Gilles Bloch, PDG de l’Inserm « Cette annonce vient non seulement couronner le travail d’excellence menée par une équipe française alliant recherche fondamentale et recherche clinique mais démontre également la capacité d’innovation issue de la recherche que l’Institut mène avec ses partenaires. C’est aussi, et surtout une formidable nouvelle pour les patients en leur offrant l’espoir d’une meilleure qualité de vie»

Pour Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP : « De la recherche fondamentale à l’arrivée d’un nouveau traitement pour des maladies rares, cette autorisation est l’aboutissement d’un partenariat exemplaire et une démarche inspirante comme on aimerait en favoriser beaucoup ».

En France, le traitement par Alpelisib entre dans le cadre d’une autorisation exceptionnelle délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé permettant de traiter des patients souffrant de maladies avec un pronostic grave et sans traitement approprié, dans une indication thérapeutique donnée. L’autorisation de mise sur le marché en Europe prendra un peu plus de temps du fait d’une étude clinique randomisée encore en cours.

 

[1] Vijoice® Novartis

[2] Canaud G, et al. – EPIK-P1: Retrospective Chart Review Study of Patients With PIK3CA-Related Overgrowth Spectrum Who Have Received Alpelisib as Part of a Compassionate Use Programme / Presented at the 2021 ESMO Congress; September 17-21, 2021.

[3] Venot, Q., et al. Targeted therapy in patients with PIK3CA-related overgrowth syndrome. Nature 558, 540–546 (2018). https://doi.org/10.1038/s41586-018-0217-9

[4] Morin, G, et al., Treatment of two infants with PIK3CA-related overgrowth spectrum by alpelisib. J Exp Med (2022) 291 (3). https://doi.org/10.1084/jem.20212148

Le gène MICA est un nouveau gène de réponse immune permettant de prédire l’échec d’une greffe de rein

Image histologique d’un rejet de greffe rénale médié par des anticorps. Sophie Caillard/Jérome Olagne (Inserm U1109)

La greffe de rein est l’unique traitement curatif pour les personnes souffrant d’insuffisance rénale terminale, mais cette intervention n’est pas toujours un succès car le greffon peut être rejeté par l’organisme du patient. Afin de diminuer le risque de rejet, les médecins peuvent aujourd’hui s’intéresser à un certain nombre de paramètres génétiques et immunologiques pour évaluer l’histocompatibilité entre donneur et receveur, c’est-à-dire le degré de compatibilité de leurs organes et de leurs tissus. Toutefois, les rejets sont toujours fréquents et beaucoup demeurent inexpliqués. Dans une nouvelle étude, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’Université de Strasbourg et des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg au sein de l’unité U1109 « Immunologie et Rhumatologie Moléculaire », et leurs partenaires du Laboratoire d’Excellence (LabEx) Transplantex, rapportent que le gène MICA est un nouveau gène d’histocompatibilité, c’est à dire qu’il permet de mieux expliquer et prédire le succès ou l’échec d’une greffe de rein. Les résultats sont publiés dans la revue Nature Medicine.

La greffe de rein est aujourd’hui le meilleur traitement disponible pour les patients atteints d’insuffisance rénale terminale. En France, près de 4000 greffes rénales sont effectuées en moyenne chaque année (près de 20000 aux Etats-Unis). Ces greffes sont principalement réalisées à partir de donneurs décédés, même si le nombre de greffes à partir de donneurs vivants augmente progressivement chaque année depuis vingt ans.

La possibilité de rejet du greffon considéré comme « étranger » par l’organisme du receveur demeure aujourd’hui la limite principale de cette procédure. La prise de médicaments immunosuppresseurs[1] permet de réduire le risque mais ne l’élimine pas et le rejet dit « chronique » (à distance de l’acte chirurgical de la greffe) reste une problématique majeure.

La découverte du système HLA par le chercheur français Jean Dausset et ses collègues au milieu du XXe siècle a permis des avancées importantes. Il s’agit d’un ensemble de protéines codées par les gènes HLA, qui sont présentes à la surface de nos cellules notamment des globules blancs.

Très diversifié et spécifique à chaque individu, ce système permet d’évaluer l’histocompatibilité entre donneur et receveur, c’est-à-dire le degré de compatibilité de leurs organes et de leurs tissus. Plus les gènes HLA entre donneurs et receveurs sont proches, plus le risque de rejet est diminué.

Cependant, il arrive que même lorsque les gènes HLA du donneur et du receveur sont compatibles, des rejets de greffes inexpliqués surviennent. Ce phénomène suggère que d’autres gènes d’histocompatibilité non encore identifiés peuvent être impliqués dans les rejets.

Un rôle pour le gène MICA

Des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, de l’université de Strasbourg et des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg et leurs partenaires du LabEx Transplantex se sont donc intéressés à un gène découvert il y a déjà presque trente ans par Seiamak Bahram[2] qui a coordonné ces nouveaux travaux.

Ce gène, appelé MICA, code pour une protéine exprimée sur plusieurs types de cellules. De précédentes études avaient déjà suggéré que ce gène était important pour prédire le devenir d’une greffe, mais elles portaient sur un nombre trop restreint de patients (entre autres limites méthodologiques) pour pouvoir affirmer qu’il s’agissait d’un gène d’histocompatibilité. Par ailleurs ces études ne s’intéressaient pas au système MICA dans son ensemble, c’est-à-dire à la fois à la génétique (histocompatibilité) et aux aspects sérologiques (présence d’anticorps anti-MICA dans le sang du receveur).

L’équipe a ici étudié le gène MICA chez plus de 1500 patients ayant reçu une greffe de rein ainsi que chez leurs donneurs. Les analyses de séquences du gène MICA révèlent que lorsque receveur et donneur présentent une version différente du gène, la survie du greffon est diminuée.

Par ailleurs, les chercheurs et chercheuses montrent que ces incompatibilités du gène MICA sont à l’origine chez les patients de la synthèse d’anticorps dirigés contre les protéines MICA du donneur, qui interviennent dans le rejet de greffe. Ces anticorps sont produits lorsque les protéines MICA du donneur sont trop différentes de celles du receveur.

Ces résultats suggèrent que le gène MICA serait un gène d’histocompatibilité pertinent à prendre en compte au moment d’une greffe, et que la recherche d’anticorps anti-MICA peut également être intéressante pour prédire le succès ou l’échec de la greffe. Ils doivent maintenant être validés dans le cadre de larges études prospectives dans laquelle MICA sera considéré au même titre que les gènes HLA classiques.

« Suite à ce travail, on pourrait d’ores et déjà envisager de généraliser en clinique le séquençage du gène MICA et l’identification d’anticorps anti-MICA chez les patients avant la greffe pour évaluer l’histocompatibilité avec le donneur et après la greffe pour mieux prévenir les épisodes de rejets. Enfin, nous envisageons aussi d’étudier le rôle du gène MICA dans la greffe d’autres organes solides, notamment le cœur, le poumon ou encore le foie », souligne Seiamak Bahram.

 

[1] Traitements qui limitent l’action du système immunitaire utilisés pour les maladies auto-immunes ou en cas de greffe.

[2] Professeur des Université-Praticien Hospitalier et directeur de l’Unité 1109 de l’Inserm et du LabEx Transplantex et chef de service d’immunologie biologique aux HUS.

Une thérapie génique à l’étude contre la maladie de Steinert

La maladie de Steinert est due à une répétition anormale d’une petite séquence d’ADN au niveau du gène DMPK. © Unsplash

La dystrophie myotonique de type 1 (DM1) ou maladie de Steinert est une maladie neuromusculaire génétique rare et invalidante, qui touche de nombreux organes et dont l’issue est fatale. Aucun traitement n’est disponible à ce jour pour les malades. Forts de précédentes recherches sur les causes moléculaires de la maladie, des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, du CNRS, de Sorbonne Université, du CHU Lille et de l’Université de Lille, en partenariat avec l’Institut de myologie, au sein du Centre de recherche en myologie et du centre Lille neuroscience & cognition, ont développé et testé une thérapie génique prometteuse qui agit directement sur l’origine de la maladie. Les premiers résultats publiés dans Nature Biomedical Engineering  montrent, chez la souris, une correction des altérations moléculaires et physiologiques du muscle squelettique[1].

La dystrophie myotonique de type 1 (DM1) ou maladie de Steinert est une maladie neuromusculaire génétique et héréditaire rare qui touche environ 1 personne sur 8 000. Invalidante et mortelle, cette affection est dite « multisystémique » car, elle touche à la fois les muscles (affaiblissement et atrophie des muscles appelés « dystrophie », défaut de relaxation musculaire appelé « myotonie »), mais aussi d’autres organes (appareil cardiorespiratoire, système digestif, système nerveux…). Elle s’exprime et évolue très différemment d’un malade à l’autre et n’a pour l’heure pas de traitement.

Elle est due à une répétition anormale d’une petite séquence d’ADN (triplet CTG[2]) au niveau du gène DMPK (Dystrophie Myotonine Protéine Kinase) situé sur le chromosome 19. Chez un individu sain, cette séquence est présente mais répétée 5 à 37 fois. En revanche, chez les patients atteints de DM1, on observe une mutation qui se traduit par une augmentation du nombre de triplets, pouvant atteindre plusieurs milliers de répétitions.

À propos des mécanismes permettant l’expression des gènes

Pour conduire à la production d’une protéine, un gène (localisé dans le noyau de la cellule) est d’abord transcrit en une molécule d’ARN. Pour devenir un ARN messager (ARNm), il va subir une maturation, passant notamment par un épissage : schématiquement, la molécule est coupée en morceaux dont certains sont éliminés et d’autres joints. Grâce à ce processus finement régulé, un seul gène peut conduire à la synthèse de différents ARNm, et donc de différentes protéines. Après l’épissage, l’ARNm mature sera finalement traduit en protéine, à l’extérieur du noyau cellulaire. 

Dans la maladie de Steinert, le gène muté est transcrit mais les ARNm mutants sont retenus dans le noyau des cellules sous forme d’agrégats caractéristiques. En effet, dans les cellules des personnes atteintes de DM1, les protéines MBNL1 qui se lient normalement à certains ARN pour réguler leur épissage et leur maturation, sont « capturées » par les ARN porteurs de la mutation.

Ainsi séquestrées dans les agrégats, il leur est impossible d’exercer leurs fonctions, ce qui entraîne la production de protéines non, ou moins, fonctionnelles, dont certaines ont été associées à des symptômes cliniques.

L’équipe dirigée par Denis Furling, directeur de recherche CNRS, au sein du Centre de recherche en myologie (Inserm/Sorbonne université/Institut de myologie), en association avec celle de Nicolas Sergeant, directeur de recherche Inserm du centre Lille neuroscience & cognition (Inserm/Université de Lille/CHU Lille), s’est intéressée à une stratégie thérapeutique visant à restaurer l’activité initiale de MBNL1 dans les cellules musculaires squelettiques exprimant la mutation responsable de la maladie de Steinert.

Pour cela, les scientifiques ont conçu par ingénierie des protéines modifiées présentant, comme la protéine MBNL1, des caractéristiques de liaison aux ARN porteurs de la mutation et agissant par conséquent comme un leurre pour ces ARN.

Ils ont observé en exprimant ces protéines leurres in vitro dans des cellules musculaires issues de patients atteint de DM1, qu’elles étaient capturées par les ARN mutés en lieu et place des protéines MBNL1. Ces dernières, étaient alors libérées des agrégats d’ARN mutés et retrouvaient leur fonction normale. Ainsi, les erreurs d’épissage présentes initialement dans ces cellules disparaissaient. Enfin, l’ARN muté lié aux protéines leurres s’avérait moins stable et pouvait être plus facilement et efficacement éliminé par la cellule.

Agrégats d’ARN-DMPK mutant contenant des répétitions pathologiques de triplets (rouge) visualisées par FISH/IF dans les noyaux (bleu) de cellules musculaires (vert) isolées de patients atteint de Dystrophie Myotonique de type 1. ©Denis Furling et Nicolas Sergeant

L’équipe de recherche a ensuite transposé cette technique dans un modèle animal afin de vérifier la validité de cette approche in vivo. À l’aide des vecteurs viraux utilisés en thérapie génique, les protéine leurres ont été exprimées dans le muscle squelettique de souris modèles de la maladie de Steinert. Chez ces dernières, une seule injection a permis de corriger efficacement, sur une longue durée et avec peu d’effets secondaires, les atteintes musculaires associées à la maladie, en particulier les erreurs d’épissage, la myopathie et la myotonie.

« Nos résultats soulignent l’efficacité contre les symptômes de la maladie de Steinert, d’une thérapie génique fondée sur la production par bio-ingénierie de protéines leurres de liaison à l’ARN possédant une forte affinité pour les répétitions pathologiques présentes dans l’ARN muté, afin de libérer les protéines MBNL1 et de retrouver leurs fonctions régulatrices », déclare Denis Furling. Cependant les auteurs pointent que des études additionnelles sont nécessaires avant de pouvoir transposer cette thérapie en étude clinique.

« Ces travaux ouvrent la voie au développement de solutions thérapeutiques dans le cadre d’autres maladies dans lesquelles des répétitions pathologiques dans l’ARN entraînent une dysfonction de la régulation de l’épissage », conclut Nicolas Sergeant.

 

[1] Le muscle strié squelettique est le muscle qui est attaché au squelette par les tendons et qui, par sa capacité à se contracter, permet d’effectuer des mouvements précis dans une direction bien définie.

[2] La séquence de codage d’un gène est composée d’un enchaînement de différentes combinaisons de 4 acides nucléiques : adénine, guanine, cytosine et thymine (remplacé par uracile dans l’ARN). Ceux-ci sont organisés en triplets (ou codons), dont la bonne « lecture » par la machinerie cellulaire permet l’expression d’une protéine.

Drépanocytose et beta thalassémie-transfusion dépendante : résultats prometteurs d’un traitement par thérapie génique

Globules rouges en forme de faucille (drépanocytose)

Globules rouges en forme de faucille (drépanocytose) ©Inserm/Chevance de Boisfleury, Anne-Marie

Des équipes de l’AP-HP, d’Université de Paris, de l’Inserm, au sein de l’Institut Imagine, de l’Université Paris-Est Créteil et du CEA ont mené une étude clinique de thérapie génique consistant à transplanter chez le patient ses propres cellules souches hématopoïétiques1 génétiquement modifiées. Cet essai clinique de phase I/II, promu par bluebird bio, a été réalisé chez des patients atteints de drépanocytose ou de beta thalassémie dépendante des transfusions, des maladies génétiques fréquentes qui touchent les globules rouges. Les résultats de ces travaux, coordonnés par le Pr Marina Cavazzana et le Pr Philippe Leboulch, ont fait l’objet d’une publication le 24 janvier 2022 dans Nature Medicine.

Dans le cadre de l’essai clinique HGB-205 de phase I/II, quatre patients b-thalassémiques et trois patients drépanocytaires âgés de 13 à 21 ans ont été traités par thérapie génique lentivirale. Ils ont été suivis pendant une durée médiane de 4,5 ans après inclusion dans les protocoles spécifiques dédiés LTF-303 (pour les patients b-thalassémiques) et LFT-307 (pour les patients drépanocytaires).

Selon les résultats, les patients atteints de b-thalassémie sont tous devenus « transfusion indépendants », dès le premier mois après le traitement, avec une nette amélioration de la surcharge en fer et une correction des paramètres biologiques liés à l’anémie chronique.

Une rémission de toute la symptomatologie clinique2 et une correction des paramètres biologiques soutenues dans le temps ont été obtenues chez deux des trois patients drépanocytaires traités. Une réduction du rythme transfusionnel a été obtenue pour le troisième patient drépanocytaire.

L’ensemble de ces résultats est maintenu dans le temps avec plus de 4 ans et demi de suivi pour trois patients. Aucun effet adverse lié à l’utilisation du vecteur lentiviral thérapeutique n’a été observé.

Pour les patients atteints de b-thalassémie, les résultats rapportés à long terme montrent que la thérapie génique par addition des gènes est devenue une option curative potentiellement utilisable chez l’ensemble des patients qui ne disposent pas d’un donneur de cellules souches hématopoïétiques compatible.

Dans le cas de la drépanocytose, la correction des paramètres biologiques liés à l’anémie chronique de deux patients sur trois apporte la preuve du principe de son efficacité et ouvre la voie à l’introduction d’améliorations ultérieures dans le but d’obtenir le même résultat chez l’ensemble des patients drépanocytaires traités.

 

Drépanocytose et beta thalassémie dépendante des transfusions

La drépanocytose et la b-thalassémie dépendante des transfusions sont des maladies génétiques fréquentes. Elles constituent donc un problème important de santé publique. Ces deux anémies chroniques sont dues à des mutations du gène codant la chaîne beta (b) de l’hémoglobine adulte (HbA).

La b-thalassémie dépendante des transfusions se caractérise par une absence (b0) ou une forte réduction (b+) de la synthèse de chaînes b-globine, responsable d’une fabrication inefficace des globules rouges et d’une anémie hémolytique chronique et sévère, requérant des transfusions de globules rouges tout au long de la vie. L’accumulation de fer qui s’en suit peut provoquer la survenue d’une insuffisance cardiaque, de cirrhose, d’un cancer du foie et de multiples anomalies endocriniennes.

La drépanocytose résulte de la mutation d’un acide aminé en position 6 de la chaîne b-globine (mutation E6V), avec comme conséquence la polymérisation de l’hémoglobine drépanocytaire HbS (hemoglobine « sickle » en anglais) une fois les molécules d’oxygène (O2) délivrées. La polymérisation de l’HbS est à l’origine de crises vaso-occlusives douloureuses caractérisées par une obstruction locale de la circulation sanguine qui peuvent toucher tous les organes et d’une anémie hémolytique chronique3. La répétition des crises vaso-occlusives et l’atteinte vasculaire portent atteinte à plusieurs organes vitaux comme les poumons, les reins, le système nerveux central et le cœur, avec une diminution importante de la durée de vie moyenne des sujets atteints.

Comme pour la quasi-totalité des maladies génétiques du système hématopoïétique, la seule option curative consiste à greffer des cellules souches hématopoïétiques. Cette approche donne de très bons résultats cliniques et une faible mortalité lorsqu’un donneur de la fratrie HLA-compatible est disponible. Malheureusement, un pourcentage limité des patients peut bénéficier de ce traitement (<20%). Le recours à des donneurs partiellement compatibles limite grandement les chances de succès et comporte une morbidité à long terme significative, en particulier chez les patients les plus âgés.

 

Thérapie génique

La thérapie génique, grâce à la transplantation des cellules souches provenant du patient même, génétiquement modifiées, est une alternative prometteuse. Elle comporte de faibles risques de toxicité immunologique étant donné qu’aucun traitement immunosuppresseur n’est requis. Elle peut être mise en place pour chaque patient qui en a besoin, le patient étant son propre donneur.

La thérapie génique par addition des gènes est la première stratégie à avoir vu le jour dans cette indication en exploitant la capacité des vecteurs lentiviraux4 à transférer une information génétique complexe dans le génome de cellules souches hématopoïétiques sans que les cellules n’aient besoin d’effectuer une division cellulaire.

Le vecteur lentiviral utilisé dans cet essai clinique de phase I/II a été mis au point par l’équipe dirigée par le Pr Philippe Leboulch. Ce vecteur permet la synthèse d’une forme modifiée de la chaîne b-globine (bT87Q), modification génétique qui a un double intérêt: elle lui confère une propriété anti-polymérisante comparable à celle de la chaîne gamma (g) de l’hémoglobine fœtale (HbF) chez les patients drépanocytaires et permet son dosage spécifique dans le sang des patients traités. En effet la chaîne bT87Q-globine peut être distinguée des autres chaînes de globines par chromatographie liquide sous haute pression, en particulier de la chaîne b-globine issue de l’hémoglobines adulte (HbA), produite de manière endogène chez les patients b-thalassémiques porteurs de mutations b+ et présente dans les globules rouges transfusés.

 

1Les cellules souches hématopoïétiques sont nichées dans la moelle osseuse et sont à l’origine des différentes cellules du sang : les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes.

2L’ensemble de signes cliniques pathologiques qui caractérisent une maladie.

3Il s’agit d’une pathologie souvent héréditaire qui atteint les globules rouges avec, in fine, une réduction pathologique de leur nombre incompatible avec la vie et nécessitant des transfusions sanguines régulières dont la fréquence est dictée par le niveau d’Hémoglobine et les symptômes cliniques.

4Il s’agit des navettes d’informations génétiques dans le noyau des cellules dérivées du virus HIV-1 auquel on a enlevé les éléments génétiques qui lui permettent de se répliquer et de donner la maladie infectieuse dont il est responsable. Les éléments qui leur permettent de franchir la membrane nucléaire et de s’intégrer d’une façon stable dans le génome des cellules cibles ont en revanche été conservés.

Étude du traitement par thérapie génique dans le syndrome de Wiskott-Aldrich

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Des équipes de l’AP-HP, d’Université de Paris, de l’Inserm, au sein de l’Institut Imagine, de l’University College of London, et de Généthon, ont mené des travaux sur le traitement par thérapie génique consistant à transplanter chez le patient ses propres cellules souches hématopoïétiques génétiquement modifiées dans le cadre d’un essai clinique de phase I/II, promu par Genethon, chez 8 patients atteints du syndrome de Wiskott-Aldrich (WAS). Les résultats de ces travaux, menés en parallèle à l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, au Great Ormond Street Hospital et au Royal Free Hospital à Londres et coordonnés par le Pr Marina Cavazzana, le Pr Adrian Thrasher et le Pr Emma Moris, ont fait l’objet d’une publication le 24 janvier 2022 dans Nature Medicine.

Le syndrome de Wiskott-Aldrich (WAS) est un déficit immunitaire complexe lié au chromosome –X et causé par des mutations du gène WAS qui code pour la protéine WAS (WASp). Cette protéine est clef dans la régulation de l’actine du cytosquelette1 dans les cellules hématopoïétiques.

Le défaut de cette protéine est responsable d’une thrombocytopénie à plaquettes de petite taille2 et d’une mauvaise fonction des globules blancs, spécialement des lymphocytes T, B, Natural killer et des cellules dendritiques.

Le phénotype clinique plus grave se caractérise par des infections sévères, saignements, eczéma et manifestations d’auto-immunité avec un risque important de développer des complications tumorales. La gravité de l’expression clinique est liée au niveau d’expression de la protéine WAS. Sans traitement curatif les patients ne survivent pas au-delà de la deuxième-troisième décade de vie.

Le traitement de choix est constitué par la greffe allogénique3 de cellules souches hématopoïétiques HLA-geno-identiques qui a de très bons résultats surtout si elle est réalisée précocement (<5 ans).

Le pronostic de la greffe allogénique dépend effectivement d’un certain nombre de paramètres en plus de l’âge du patient, dont le degré de compatibilité HLA entre donneur et receveur et le niveau de prise hématopoïétique.

En l’absence d’un donneur HLA–compatible, les équipes de recherche ont proposé un traitement par thérapie génique qui consiste à prélever chez les malades des cellules souches sanguines porteuses de l’anomalie génétique (cellules souches hématopoïétiques CD34+), puis à les corriger au laboratoire en introduisant le gène WAS sain grâce à un vecteur lentiviral développé par l’équipe d’Anne Galy, à Généthon où ont également été produits les lots cliniques de vecteurs. Les cellules corrigées sont ensuite injectées aux malades, au préalable traités par chimiothérapie afin d’éliminer les cellules malades et faire place aux cellules autologues corrigées in vitro qui vont alors donner naissance aux diverses cellules qui composent le sang (globules blancs et rouges, plaquettes).

Dans l’article qui vient d’être publié dans Nature Médicine, les résultats cliniques et biologiques à long terme (suivi médian de 7,6 ans) de l’essai de phase I/II chez 8 patients atteints de WAS sont décrits avec une attention particulière portée à deux complications graves de cette maladie : la thrombocytopénie et l’auto-immunité. Il est à souligner que tous les patients inclus dans cet essai présentaient la forme plus sévère de ce déficit immunitaire et n’étaient pas éligibles à une greffe de moelle osseuse allogénique.

Après , les cellules hématopoïétiques génétiquement corrigées ont montré une greffe stabilisée, confirmant ainsi les premiers résultats rapportés dans JAMA il y a quelques années pour 6 d’entre eux.

La stabilité des cellules souches génétiquement modifiées greffées a permis de corriger les principaux symptômes de la maladie comme les infections sévères récurrentes ou l’eczéma et a permis d’améliorer ou de résoudre les hémorragies et les signes d’auto-immunité. La fonction des lymphocytes T a été complètement restaurée comme cela est démontré par le nombre total de lymphocytes T naïfs, la restauration de la synapse immunologique ainsi que des fonctions de ces cellules indispensables pour combattre les infections.

Aucun effet adverse lié à l’utilisation d’un vecteur rétroviral n’a été rapporté ni une absence de stabilité de la greffe de cellules génétiquement modifiées.

L’analyse de sites d’intégration lentivirale révèle un profil polyclonal sans aucune expansion clonale ou intégration dangereuse du vecteur (risque de transformation néoplasique). En effet, grâce aux vecteurs lentiviraux, la nouvelle information génétique est introduite d’une façon stable et aléatoire dans le génome du patient. La capacité à séquencer le génome entier permet de suivre exactement les sites d’intégration du nouveau matériel génétique et de s’assurer de leur innocuité au regard des fonctions physiologiques de la cellule cible. Ce séquençage a permis de valider à long terme la sécurité de ces vecteurs rétroviraux car aucune perturbation génétique n’a été observée.

A noter : un patient âgé de 30 ans a été traité dans cet essai montrant ainsi l’efficacité de ce traitement chez des patients adultes avec un thymus qu’on pouvait penser peu ou pas fonctionnel après des longues années de maladie. De même une correction complète du compartiment lymphocytaire B a été obtenu, ce qui a permis d’arrêter la substitution d’immunoglobuline chez 5 patients traités et de voir une diminution significative voire une disparition des signes d’auto-immunité.

Tous les patients traités ont vu leurs épisodes de saignements spontanés diminuer d’une façon significative en fréquence et sévérité même si pour 5 patients, le nombre des plaquettes reste au-dessous des valeurs normales.

Au total, la thérapie génique par addition des gènes confirme son intérêt thérapeutique pour un déficit complexe de l’immunité cellulaire tel que le syndrome de Wiskott Aldrich. De nouvelles études sont en cours pour essayer de continuer à optimiser ces résultats cliniques à long terme. 

 

1Il s’agit d’une protéine de la membrane cellulaire dont l’activité de contraction et relâchement permet à chaque cellule sanguine de bien faire son travail comme les déplacements d’un endroit à l’autre ou d’éliminer une cellule « malade » dans le cas des cellules tueuses.

2Il s’agit de la diminution pathologique du nombre de plaquettes qui en plus ont une taille diminuée par rapport à la valeur physiologique.

3Le terme allogénique fait référence aux cellules, tissus ou organes prélevés chez un donneur sain pour être greffés à un receveur qui est fortement, mais non entièrement, compatible avec le donneur sur le plan génétique.

Une étude de cohorte permet d’identifier une cause génétique d’une forme rare du syndrome de Cushing induit par l’alimentation

Coupe de rein humain grossie 400 fois par un microscope à immunofluorescence polychromatique

Coupe de rein humain grossie 400 fois par un microscope à immunofluorescence polychromatique.© Inserm/Oriol, Rafael

 

L’équipe composée de chercheurs et chercheuses du service d’endocrinologie et des maladies de la reproduction de l’hôpital Bicêtre AP-HP, de l’Inserm et de l’Université Paris-Saclay, a mené des travaux, coordonnés par le Professeur Peter Kamenický, pour étudier la cause génétique de l’hyperplasie bilatérale macronodulaire des surrénales avec syndrome de Cushing induit par l’alimentation. Cette maladie rare touche les deux glandes surrénales situées au-dessus des reins et entraine une surproduction du cortisol, une hormone stéroïde dont l’excès a des conséquences néfastes pour l’organisme. Les chercheurs ont pu déterminer l’explication moléculaire de la survenue de cette maladie 30 ans après sa description initiale. Ces travaux ont fait l’objet d’une publication le 13 octobre 2021 dans la revue The Lancet Diabetes & Endocrinology.

Cette forme rare du syndrome de Cushing surrénalien, étudiée par ces chercheurs, est due à l’expression anormale du récepteur du GIP (Glucose-dependent insulinotropic peptide), dans les deux glandes surrénales des patients. Le GIP est une hormone produite par l’intestin grêle en réponse à l’ingestion d’aliments. Chez les patients atteints de cette forme particulière du syndrome de Cushing, les concentrations de cortisol augmentent anormalement après chaque prise alimentaire. Les patients atteints de cette maladie développent les signes cliniques typiques du syndrome de Cushing tels que la prise de poids associée à une atrophie musculaire, l’hypertension artérielle, le diabète sucrée, l’ostéoporose et la dépression. La pathologie est associée à une augmentation de la mortalité, surtout des causes cardiovasculaires.

Dans cette étude internationale impliquant les chercheurs de six pays, et reposant notamment sur une collaboration étroite franco-québécoise, l’équipe rapporte que l’hyperplasie macronodulaire des surrénales GIP-dépendante, dans ses formes familiales comme sporadiques, est une maladie génétique, causée par des mutations germinales de Lysine Déméthylase 1A (KDM1A) avec une perte secondaire du second locus de KDM1A, comportant la seconde copie du gène, dans le tissu surrénalien. KDM1A agit principalement comme un répresseur transcriptionnel (i.e. un régulateur qui empêche un gène d’être exprimé), la perte de sa fonction aboutit à une dérégulation d’expression de différents gènes dans le tissu surrénalien, incluant le récepteur du GIP mais également d’autres récepteurs couplés aux protéines G.

Cette découverte permettra de proposer un conseil génétique et une détection plus précoce de cette maladie rare aux patients et à leurs apparentés. Les maladies rares sont en général sous-diagnostiquées. Ceci est d’autant plus important que les variations pathogènes de KDM1A prédisposent également au myélome et à d’autres types de cancer.

De plus, ce nouveau rôle de KDM1A comme régulateur épigénétique de l’expression du récepteur du GIP et d’autres récepteurs couplés aux protéines G pourrait avoir des implications pharmacologiques.

Covid-19 : découverte d’une signature moléculaire des myocardites pédiatriques

enfant masqué

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Dans de très rares cas, des enfants ayant contracté la COVID-19 développent une inflammation sévère 4 à 6 semaines suivant leur infection par le virus SARS-CoV-2. Pour les deux tiers, ce syndrome inflammatoire atteint le cœur, entraînant des cas de myocardite. Dans une étude parue dans la revue MED, des chercheurs, médecins et enseignants chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP et d’Université de Paris à l’Institut Imagine, en collaboration avec l’Institut Pasteur, ont analysé le sang d’une cohorte de 56 patients jeunes ayant été hospitalisés à l’Hôpital Necker Enfants-Malades AP-HP. Ils ont ainsi pu identifier l’expression anormale de plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre d’identifier les enfants à risque de développer cette inflammation cardiaque rare.

Certains enfants infectés par le SARS-Cov-2 développent des inflammations sévères quatre à six semaines après leur infection, avec des symptômes variés : fièvre, douleurs gastriques, éruptions cutanées… Dans environ 70% des cas, ce syndrome inflammatoire dit « multisystémique » s’étend au myocarde, muscle assurant les contractions cardiaques. Ces cas sévères de myocardites ont été signalés pour la première fois en Angleterre, au mois de mars 2020, avant d’être observés en Italie, en France, puis partout dans le monde. Comment expliquer ces formes rares ?

 

Des analyses de pointe

Dans une étude parue dans MED, nouveau journal créé par la revue Cell, menée par les chercheurs Inserm Frédéric Rieux-Laucat et Mickaël Ménager (*) au sein de deux laboratoires de l’Institut Imagine (Inserm, Université de Paris, AP-HP), en collaboration avec des médecins de l’Hôpital Necker-Enfants Malades AP-HP et de l’Institut Pasteur, ont mené des investigations moléculaires de pointe pour répondre à cette question. Résultat : ils ont identifié plusieurs gènes associés à la survenue de formes sévères de myocardite chez ces enfants.

Pour y arriver, les auteurs ont analysé les prélèvements sanguins de 56 enfants hospitalisés entre le 6 avril et le 30 mai 2020. Au total, 30 avaient développé un syndrome inflammatoire multisystémique consécutif à une infection au SARS-CoV-2, dont 21 avec une forme sévère de myocardite, et 9 sans myocardite. « Pour comprendre la différence entre ces deux groupes de patients, nous avons mené plusieurs analyses utilisant des techniques de pointe : un dosage ultra-sensible des cytokines – les hormones du système immunitaire permettant une réponse adaptée en cas d’infection –, une caractérisation de la composition des cellules du sang, et une analyse de l’expression des gènes cellule par cellule », explique Mickaël Ménager.

 

Trois anomalies moléculaires

Résultat : dans les deux groupes, les chercheurs ont mis en évidence une diminution du nombre de monocytes et de cellules dendritiques (globules blancs), ainsi qu’une augmentation du taux de cytokines inflammatoires et une suractivation de ce qu’on appelle « la voie NF-kB » au sein de ces cellules.

« Il s’agit d’une voie moléculaire permettant d’activer un ensemble de gènes, aboutissant à la production de protéines chargées d’orchestrer la réponse immunitaire, résume Frédéric Rieux-Laucat. Or, c’est précisément la suractivation de ce système qui, chez ces patients, déclenche une hyperinflammation ».

En comparant plus finement les cellules dendritiques et les monocytes des deux groupes, les auteurs ont observé trois anomalies spécifiques des patients avec myocardite : un défaut d’inhibition dans la voie NF-kB, une surproduction de « TNF-α » (cytokine impliquée dans l’activation de la voie NF-kB), et enfin un défaut de réponse aux interférons de type I et II (cytokines impliquées dans la régulation de l’inflammation).

Toutes ces anomalies peuvent s’expliquer par une expression anormale de certains gènes. Afin d’identifier ces gènes, les auteurs ont procédé à une analyse génétique cellule par cellule. « Nous avons ainsi pu identifier et valider plus d’une centaine de gènes surexprimés spécifiquement dans les monocytes et les cellules dendritiques de patients avec formes sévères de myocardite », explique Mickaël Ménager. Cette signature moléculaire pourrait, à terme, permettre la mise au point de tests pour identifier les patients à risque de développer ces inflammations cardiaques sévères.

 

(*) Frédéric Rieux-Laucat est directeur du laboratoire d’Immunogénétique des maladies auto-immunes pédiatriques. Mickaël Ménager est directeur du laboratoire « réponses inflammatoires et réseaux transcriptomiques dans les maladies » et responsable du LabTech Single-Cell@Imagine, plateforme dédiée à l’étude de l’expression des gènes cellule par cellule.

Un manque d’hormones placentaires pourrait jouer un rôle dans l’apparition de déficits neurodéveloppementaux

Image de coupe sagittale de cervelet de souris acquise en microscopie électronique montrant la substance blanche avec ses axones myélinisés et la substance grise avec la couche des grains. Claire-Marie Vacher (Columbia University Medical Center)/Cheryl Clarkson-Paredes and Anastas Popratiloff (The George Washington Nanofabrication & Imaging Center).

Plusieurs études ont montré que la prématurité augmentait le risque d’apparition de désordres neurodéveloppementaux tels que les troubles du spectre autistique (TSA). Plus la naissance est prématurée, plus le risque d’apparition de déficits moteurs ou cognitifs est élevé. Comment expliquer cela ? Des chercheurs de l’Université de Columbia à New York et du Children’s National Hospital de Washington, D.C., en collaboration avec  l’Inserm et l’Université Paris-Saclay, se sont penchés sur cette question et ont fait l’hypothèse que la perte prématurée du placenta pourrait jouer un rôle dans les déficits observés. Grâce au développement d’un nouveau modèle préclinique chez la souris, ils ont montré que la diminution significative d’une hormone placentaire, dont le cerveau en développement devrait normalement bénéficier dans la seconde moitié de la gestation, pourrait favoriser le risque d’apparition de troubles comportementaux qui pourraient s’apparenter aux troubles du spectre de l’autisme. Ces effets sont principalement observés chez les mâles. L’étude fait l’objet d’une publication dans la revue Nature Neuroscience.

Le placenta est un organe qui permet l’alimentation du fœtus en oxygène et nutriments et élimine les déchets. Il produit également des hormones, notamment des taux élevés d’alloprégnanolone  ou ALLO (une hormone dérivée de la progestérone) à la fin de la grossesse. Environ un nouveau-né sur 10 naît prématurément et de fait est privé de taux normaux de cette hormone.

Des chercheurs américains à l’Université de Colombia, en collaboration avec les équipes françaises de l’Inserm au sein de l’unité Maladies et Hormones du Système Nerveux (U 1195 Inserm) se sont intéressés au rôle du placenta dans le développement cérébral  pour tenter notamment d’expliquer le lien entre prématurité et risque élevé d’apparition de déficits moteurs ou cognitifs. Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont créé un modèle de souris dans lequel ils ont été en mesure de réduire de manière sélective la production placentaire d’ALLO au cours de la gestation, afin que les souriceaux soient exposés à des taux placentaires d’ALLO insuffisants.

L’équipe de chercheurs a ainsi découvert que la diminution de la concentration de cette hormone dans le placenta altérait le développement du cerveau sur le long terme, entraînant l’apparition de comportements de type autistique chez les descendants mâles.

En effet, bien que les fœtus mâles et femelles aient été, les uns comme les autres, soumis à une insuffisance d’ALLO, seuls les souriceaux mâles ont présenté des comportements de type autistique après la naissance, notamment des difficultés d’interaction avec les autres animaux et des stéréotypes moteurs. Les chercheurs ont ensuite analysé leur développement cérébral et suivi les conséquences de cette insuffisance sur leur comportement jusqu’à l’âge adulte.

Les souris mâles ayant reçu des taux placentaires d’ALLO insuffisants présentaient des modifications structurelles du cervelet, une région du cerveau impliquée dans la coordination des mouvements et qui a également été liée à l’autisme.

« En particulier, nous avons observé un épaississement de la gaine de myéline, le revêtement qui protège les fibres nerveuses et accélère la propagation de l’influx nerveux », a indiqué Claire-Marie Vacher, PhD, professeure associée en néonatalogie dans le département de Pédiatrie du Vagelos College of Physicians and Surgeons de l’Université de Columbia et première auteure de l’article. « On sait que des changements comparables ont été observés de manière transitoire dans le cervelet de certains enfants de sexe masculin souffrant d’autisme. »

« Chez l’animal, l’établissement d’un lien entre une modification de la fonction placentaire au cours de la gestation et des effets persistants sur le développement ultérieur du cerveau est un résultat particulièrement frappant », indique Anna Penn, MD, PhD, cheffe du service de néonatologie à l’Université de Colombia et dernière auteure de l’étude. 

 

Des similarités avec les tissus humains

Afin de déterminer si des modifications similaires peuvent survenir chez les nourrissons, les chercheurs ont également procédé à des examens post-mortem de tissus cérébelleux de prématurés et de nourrissons arrivés à terme, décédés peu de temps après la naissance. Leur analyse a permis de mettre en évidence des modifications similaires au niveau de la gaine de myeline spécifiquement pour les nourrissons masculins lorsque le cervelet de prématurés était comparé au cervelet de nourrissons nés à terme. Cette étude est une première étape importante pour comprendre comment les hormones placentaires peuvent contribuer au développement cérébral et comportemental chez l’homme.

 

L’injection de l’ALLO réduit les symptômes autistiques

L’étude a également permis de mettre en évidence que les changements affectant la structure du cervelet et les comportements chez les souris pouvaient être évités par l’injection d’ALLO à la fin de la gestation.

Les chercheurs ont constaté qu’une injection d’ALLO chez la mère au cours de la gestation pouvait prevenir les comportements de type autistique dans leur modèle préclinique. Des résultats similaires ont été observés après une injection de muscimol, un composé qui active les récepteurs GABA-A — les mêmes récepteurs qui réagissent à l’ALLO. Avec ces traitements, les chercheurs ont également constaté une normalisation des niveaux de protéines de la myéline dans le cervelet.

« Notre étude offre de nouvelles perspectives intéressantes sur l’implication de la perte d’hormones placentaires—qui se produit en cas de naissance prématurée ou si le placenta ne fonctionne pas correctement au cours de la grossesse—sur le risque de désordres neurodéveloppementaux et comportementaux chez l’enfant», indique l’auteure principale, Claire-Marie Vacher.

« On pourrait désormais également envisager des études rétrospectives en réalisant un suivi longitudinal pour corréler des défauts endocriniens pendant la grossesse avec des troubles cognitifs et/ou comportementaux des enfants. Cela permettrait d’identifier le stade de la grossesse où l’insuffisance hormonale intervient afin d’envisager une éventuelle intervention thérapeutique », ajoute Philippe Liere, PhD, ingénieur de recherche et responsable du plateau technique analytique de spectrométrie de masse de l’U1195.

Découverte d’une première cause génétique pour le syndrome de l’homme-arbre (papillomavirus cutané)

 Papillomavirus

Papillomavirus. © Inserm/U190

Une grande partie de la population est porteuse de papillomavirus humains (HPVs), et notamment de papillomavirus cutanés, qui provoquent en général des verrues ou des lésions locales et bénignes. Pourtant, de très rares patients dans le monde développent des formes sévères de ces maladies virales, dont le syndrome de « l’homme-arbre ». Cette maladie très handicapante se manifeste par une poussée anarchique de cornes cutanées pour lesquelles une chirurgie n’est pas efficace. Dans le cadre d’une collaboration internationale, des chercheurs de l’Inserm et enseignants-chercheurs d’Université de Paris et médecins de l’AP-HP regroupés à l’Institut Imagine (Inserm/Université de Paris, AP-HP) situé au sein de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP ont mis en évidence pour la première fois une cause génétique de ce syndrome. Ce travail a été mené par Vivien Béziat, sous la supervision des Pr Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel qui dirigent un laboratoire associé entre Paris et l’Université Rockefeller de New York[1]. Il fait l’objet d’une publication le 1er juillet 2021 dans la revue Cell.

Il existe plus de 200 papillomavirus (HPVs). Certains sont à l’origine de lésions cutanées bénignes telles que les verrues vulgaires ou plantaires, d’autres peuvent entraîner des cancers du col de l’utérus. Le laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses s’est concentré sur les HPVs cutanés, et s’attache depuis plusieurs années à comprendre pourquoi quelques très rares cas développent une forme sévère de ces infections généralement sans gravité.

Une mutation génétique rend plus sensible aux papillomavirus cutanés

Dans une publication dans la revue Cell, l’équipe de Vivien Béziat, chercheur Inserm au sein du laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses a étudié les caractéristiques génétiques d’un patient iranien atteint du syndrome de l’homme-arbre, et deux membres de sa famille qui présentent une forme sévère d’infection par un HPV cutané avec un nombre important de verrues sur les mains et les pieds, mais sans avoir développé ce syndrome. Un point commun a été retrouvé chez ces trois patients : une mutation du gène CD28. Celui-ci joue en temps normal un rôle majeur dans l’activation des lymphocytes T, cellules de l’immunité qui détruisent les cellules infectées par un virus.

Chez ces patients, la mutation du gène CD28 empêche le système immunitaire de reconnaitre le virus et de déclencher une réponse appropriée. Le virus prolifère alors dans les kératinocytes, les cellules qui constituent l’épiderme de la peau, et provoque une multiplication anarchique de verrues et/ou de cornes cutanées. C’est la première fois qu’une cause génétique du syndrome de « l’homme arbre » est mise au jour.

Le gène CD28, central pour la résistance à certains papillomavirus cutanés, mais pas pour le système immunitaire

Mais en analysant la mutation CD28, c’est une autre découverte qui a été faite par ces chercheurs. Le gène CD28, jusqu’ici considéré comme un pilier dans le fonctionnement du système immunitaire et la réponse des lymphocytes T, ne semble pas avoir un rôle si majeur. En effet, les trois patients étudiés ont été exposés dans leur histoire médicale à plusieurs types de HPVs et à de très nombreux autres pathogènes. Or, ils n’ont développé de réactions sévères qu’au HPV2 pour le patient atteint du syndrome de l’homme-arbre, et au HPV4 pour les deux membres de la famille.

« Ces patients n’ont montré une sensibilité anormalement élevée qu’à certains papillomavirus du genre gamma-HPV et alpha-HPV. Sur la base des travaux menés au cours des trente dernières années, nous pensions au contraire qu’un dysfonctionnement du gène CD28 rendrait les patients sensibles à de nombreux agents infectieux. Or, même si leur réponse immunitaire est affaiblie, les patients se défendent bien contre les autres pathogènes », explique Vivien Béziat, chercheur à l’Inserm et premier auteur de l’étude.

Cette découverte apporte donc à la fois de nouvelles perspectives sur la compréhension de la susceptibilité génétique aux HPVs, et remet en cause les dogmes de réponse immunitaire par les lymphocytes T.

« Aujourd’hui, aucun traitement n’a montré d’efficacité contre le syndrome de « l’homme-arbre ». Une greffe de cellules souches hématopoïétiques afin de remplacer le système immunitaire du patient est envisagée. Ce traitement lourd et coûteux n’est cependant pas facilement accessible aux populations vivant dans des pays moins développés et qui vont évoluer vers des formes très sévères, notamment par manque d’accès aux soins. En faisant progresser la recherche, l’équipe espère pouvoir accélérer l’accès au traitement pour ces patients

 

[1] Le laboratoire de Génétique Humaine des Maladies Infectieuses est dirigé par Jean-Laurent Casanova et Laurent Abel est situé au sein de l’Institut Imagine à Paris et à l’Université Rockefeller à New York. Jean-Laurent Casanova dirige la génétique et l’immunologie expérimentale dans les deux branches (Paris et New York), tandis que Laurent Abel dirige la génétique et l’épidémiologie mathématique dans les deux branches.

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